Chômage des jeunes: les chiffres qui inquiètent

C’est bien connu: les jeunes chômeurs sont des paresseux qui ne veulent pas bosser. Et, pour le petit nombre motivé mais malchanceux, le chômage n’est de toute façon qu’un mauvais moment à passer, vu qu’il ne va pas tarder à se résorber tout seul avec la reprise qui pointe déjà le bout de son nez. D’autant plus que les jeunes chômeurs retrouvent toujours du travail très rapidement. Voilà en substance l’argumentation des partis bourgeois permettant de justifier:
1. De ne rien faire contre le chômage des jeunes (p. ex. en s’opposant à toutes les mesures proposées par le conseil fédéral dans sa «3ème phase de mesure de stabilisations»);
2. Des péjorations dramatiques de la situation des jeunes chômeurs en sabrant dans leurs prestations dans le cadre de la 4ème révision de la loi sur l’assurance-chômage. Parmi ces projets, on trouve, notamment:
• Une baisse drastique du nombre d’indemnités journalières pour les moins de 25 ans (de 400 à 130) et les 25-29 ans (de 400 à 260) et ce même s’ils ont suffisamment cotisé;
• Un affaiblissement de la notion de «travail convenable» uniquement pour les moins de 30 ans, destiné à les obliger à accepter n’importe quel emploi;
• La division par presque 3 du nombre d’indemnités journalières pour les personnes libérées de l’obligation de cotiser, en particulier les étudiants qui ont suivi une formation à plein temps.

Jugeons donc ces propositions à l’aune des derniers chiffres du chômage du Seco, parmi lesquels on peut trouver, entre autre :
• Le chômage des jeunes a augmenté de 75% entre septembre 2008 et septembre 2009
• Chez les 20-24 ans, l’augmentation est même de 82%
• Le taux de jeunes chômeurs de plus de 7 mois (ceux qui n’auraient plus droit à rien après 130 jours) a explosé de 146%. Mais à part, ça tout le monde continue à prétendre que les jeunes chômeurs retrouvent rapidement du travail.

Nuages de l’apprentissage
A cela s’ajoutent des prévision peu engageantes concernant le marché des places d’apprentissage. L’OFFT, qui publie aujourd’hui son traditionnel «baromètre des places d’apprentissage», persiste à considérer que la situation est «stable». Mais ses brillants experts ont-ils lu attentivement leurs propres chiffres? A les examiner un peu attentivement, on a peine à le croire. Voici quelques-uns des constats que l’on peut faire:
• Pour la première fois depuis 2004, le nombre de places d’apprentissage offertes recule, comme le nombre de contrats d’apprentissage signés. Certes, le nombre de jeunes recule aussi, ce qui était prévu, mais cela démontre que – contrairement à ce que d’aucuns ont pu prétendre – le recul démographique ne résoudra pas la pénurie, car il y a toujours beaucoup plus de jeunes à la recherche d’une place (91’500) que de places disponibles (87’000).
• Le nombre de jeunes sans la moindre solution à la sortie de l’école obligatoire augmente de 2000 personnes (+28%). La plupart de ces jeunes sont les futurs bénéficiaires de l’aide sociale. Entre 2006 et 2008, ce chiffre avait reculé…
• Le nombre de jeunes en «liste d’attente», c’est-à-dire qui ont dû se contenter d’une solution transitoire mais chercheront à nouveau une place l’an prochain, ne diminue que de manière marginale (-2%), malgré la bonne situation de l’économie des années précédentes et la «détente» sur le marché des places d’apprentissage que l’OFFT croyait voir. Et ce nombre reste très élevé: 21’000 jeunes. Dont la plupart n’apparaît soit dit en passant pas dans les statistiques du chômage du Seco.

Révision de la LACI: Pas sur le dos des jeunes!

Le chômage augmente, particulièrement chez les jeunes (+82% pour les 20-24 ans depuis un an!), qui ont la malchance d’arriver sur le marché du travail à un moment où les entreprises licencient. Parallèlement à cette dégradation de l’emploi, les chambres fédérales se penchent sur la révision de la loi sur l’assurance-chômage (LACI). Or, alors qu’il faudrait plutôt soutenir les jeunes qui ont des difficultés à entrer sur le marché du travail, cette révision s’en prend assez durement à eux. Continuer la lecture

Attaques inacceptables contre les jeunes chômeuses et chômeurs!

La commission de jeunesse de l’USS est scandalisée par les décisions de la commission de l’économie et de la redevance du conseil national, qui s’est violemment attaquée aux jeunes chômeurs en réduisant leurs indemnités journalières (de 400 à 130 pour les moins de 25 ans resp. à 260 pour les  25-30 ans) et en confirmant la décision du conseil des Etats de baisser les exigences du «travail convenable» pour les moins de 30 ans. Il faut en outre rappeler que le projet du conseil fédéral prévoit déjà de diviser par trois le nombre d’indemnités journalières des jeunes qui n’ont pas pu cotiser à l’assurance-chômage parce qu’ils sortent de formation.
Ces décisions sont d’autant plus inacceptables que les jeunes forment une catégorie de chômeurs particulièrement vulnérable: Comme le prévoyait la commission de jeunesse de l’USS, qui avait sonné l’alarme en février 2009 déjà, le chômage des 15-24 ans a pris l’ascenseur ces derniers mois. Par rapport à septembre 2008, il a augmenté de 75 %. Pour les 20-24 ans, l’augmentation est même de 82%!
La jeunesse syndicale exige donc le retrait de ces propositions révoltantes, qui ne sont qu’une marque de mépris envers les jeunes.

(Communiqué de presse de la commission de jeunesse de l’USS du 7.10.09)

Succès à posteriori de l’initiative pour des places d’apprentissage

Le 18 mai 2003, le peuple et tous les cantons rejetaient l’initiative «pour des places d’apprentissage» (lipa) par près de 69% de «non», malgré une belle campagne menée par des centaines de jeunes militant-e-s. Cette initiative avait été lancée par la jeunesse syndicale, la jeunesse socialiste suisse (JSS) et le conseil suisse des activité de jeunesse (CSAJ). L’USS l’avait soutenue avec énergie. Malheureusement elle avait été soumise au vote populaire lors d’un dimanche de votation battant tous les records, car il ne comportait pas moins de… 9 objets fédéraux, dont 7 initiatives provenant des syndicats, de la gauche, des milieux de défense des locataires, des handicapés ou de l’environnement. Conseil fédéral, partis bourgeois et milieux patronaux avaient donc eu beau jeu de prôner un «non» indifférencié à toutes les initiatives.
Mais l’initiative n’a pas été – et de loin – la débâcle que l’on pourrait croire de prime abord. Au contraire, elle a eu un impact positif sur la politique du conseil fédéral (qui dut mettre sur pied une «task force place d’apprentissage 2003» pour ne pas se trouver à court d’arguments contre l’initiative), sur la révision de la loi fédérale sur la formation professionnelle (LFPr) et surtout sur les actions des cantons en faveur des places d’apprentissage. Et, 6 ans après le vote populaire, elle continue d’avoir de l’influence.
Preuve en est la multiplication des fonds pour la formation professionnelle dans les cantons. Ce modèle de répartition solidaire des frais de formation entre toutes les entreprises et non pas entre les seules entreprises formatrices avait fait ses preuves dans les cantons de GE, FR et NE. L’initiative pour des places d’apprentissage s’appuyait sur ce modèle de fonds. Qui a essaimé dans tous le pays, malgré le refus de l’initiative. Depuis 2003, 5 nouveaux cantons se sont dotés d’un tel instrument: VS (2007), JU (2007), ZH (2008), TI et VD (2009). A chaque fois, les parlements cantonaux, tous à majorité bourgeoise, ont été convaincus par l’efficacité du fonds cantonal, auquel cotisent toutes les entreprises et dont les montants sont répartis entre les entreprises qui forment, ce qui encourage les entreprises «resquilleuses» (4 sur 5!) à former. Et, alors que l’initiative des jeunes avait échoué en vote populaire, c’est un vote populaire qui a adoubé le principe du fonds qu’elle défendait: au JU et à ZH, le fonds a été plébiscité par près de 60% des votants (au JU un peu plus; à ZH un peu moins), suite à des référendums lancés par des associations patronales jusqu’au-boutistes. Erreur que les patrons vaudois se sont empressés de ne pas commettre: Avant même de connaître le résultat des urnes jurassiennes et zurichoises, ils s’étaient déclarés favorables au modèle préconisé par l’initiative. Et, lors des débats parlementaires qui viennent de s’achever, plusieurs députés représentant les milieux patronaux ont multiplié les louanges envers le fonds cantonal, parlant de projet «utile» et «encourageant l’équité entre les entreprises formatrices et non-formatrices».
Cependant, tous les cantons ne sont pas encore gagnés à la cause des fonds pour la formation professionnelle. En effet, dans plusieurs cantons où syndicats et PS demandent la création d’un tel instrument (BS, SO, SG), les partis bourgeois mettent les pieds au mur, parfois pour des raisons purement idéologiques, malgré les exemples probants chez leurs voisins, parfois parce qu’ils préfèrent privilégier les fonds de branche. Ces fonds se basent sur le même principe de financement solidaire que les fonds cantonaux, mais ils ont le défaut d’être limités à une seule branche, en général une branche où la formation duale est déjà bien développée et de ne couvrir que 8% des salariés. Un fonds cantonal a l’avantage d’encourager la formation dans toutes les branches, y compris dans celles qui ont un fort potentiel, mais pas de tradition formatrice.
Cet épilogue (provisoire) prouve que l’initiative des jeunes en faveur de la formation professionnelle a été clairement un succès et que la mobilisation syndicale en valait la peine, même si on pouvait penser plutôt le contraire à l’heure du résultat des urnes. Il montre que l’engagement des syndicats en faveur de la création des places d’apprentissage a été payant sur le long terme et qu’une défaite dans les urnes ne doit jamais être un prétexte à baisser les bras. 6 ans après l’initiative «lipa», la hausse à venir du chômage des jeunes doit nous inciter à poursuivre nos efforts. Les fonds cantonaux devront notamment se montrer à la hauteur des enjeux de la crise: ils devront démontrer qu’ils sont capables de débloquer des moyens en faveur de la création de places d’apprentissage alors que les entreprises licencient. 

Le droit de vote à 16 ans vaudois par où on ne l’attendait pas

Quelle ne fut pas ma surprise à la lecture de cette initiative déposée par le groupe UDC au grand conseil vaudois: Oui, vous avez bien lu, c’est bien du droit de vote à 16 ans au niveau communal qu’il s’agit. Et l’UDC de justifier sa proposition avec un vocabulaire qu’on ne lui connaissait pas: « faire confiance aux jeunes », « équilibre entre les générations », « ils sont capables de discernement », « renforcer la démocratie », etc.

Là où ça devient franchement rigolo, c’est quand on compare cette initiative avec les positions antérieures de l’UDC, notamment des jeunes UDC…vaudois, qui sont sans exceptions opposées au droit de vote à 16 ans. Avec des arguments exactement inverses, par exemple: « tous les jeunes n’ont pas la maturité pour voter à 16 ans », « risque pour la démocratie » ou « nivellement par le bas de l’électorat ». Des arguments que le groupe UDC au grand conseil réfute aujourd’hui catégoriquement, les traitant de « réducteurs » ou « d’excuses pour ne pas discuter la proposition ». Les discussions internes entre « tenants d’un discours réducteur » et « partisans du nivellement par le bas » vont à n’en pas douter être passionnantes.

Mais alors, d’où vient cette proposition, contraire à toutes les précédentes? Ordre de Zurich? Profil médiatique avec un thème porteur? Provocation? Ou, tout simplement, changement d’avis? L’UDC vaudoise, qui a déjà changé plusieurs fois d’avis sur Harmos, n’en serait pas à son coup d’essai… A moins que le parti de M. Blocher n’ait regardé avec envie le fait que les jeunes autrichiens de 16 à 18 ans aient voté massivement pour l’extrême-droite.

En revanche, je doute que la vision qu’à l’UDC de la jeunesse n’ait beaucoup évolué. En 2007, son programme électoral parlait plus des jeunes « criminels », des jeunes « violents », des jeunes à l’aide sociale (qu’elle traite de « paresseux ») que de politique en faveur des jeunes. Bref, aux yeux de l’UDC, les jeunes sont surtout considérés comme un, voir une accumulation de problèmes.

L’initiative sera développée normalement mardi en fin d’après-midi (à condition que le parlement tienne son horaire).

Le début de la fin des multicheck

Le grand conseil a définitivement approuvé aujourd’hui la nouvelle loi vaudoise sur la formation professionnelle en deuxième lecture (avec un court troisième débat). Fort heureusement, il n’a pas remis en cause ses décisions progressistes du premier débat: fonds vaudois pour la formation professionnelle, amélioration de la surveillance de l’apprentissage, de la validation des acquis, déplafonnement du remboursement des frais de formation des apprentis. Ce remboursement des frais a d’ailleurs bien failli disparaître, comme le demandait un amendement libéral soutenu par l’UDC. Le POP avait en effet malencontreusement rouvert le débat pour faire de la surenchère sur le montant du remboursement… La majorité de droite de la commission a également tenté de réintroduire le plafonnement à 1200.—Fr. par mois. Fort heureusement, le compromis du premier débat (80.—Fr./mois, déplafonné) a tenu bon.
Le grand conseil a aussi confirmé l’obligation pour les employeurs qui demandent un test de sélection externe de type multicheck de le payer, même si le jeune postulant n’est pas engagé.
Cette proposition du groupe socialiste vise à décourager les entreprises de faire appel à ces tests bidons et à mettre un terme au petit business qui s’est monté sur le dos des jeunes qui cherchent une place d’apprentissage et de leurs familles. Rappelons qu’un de ces tests coûte dans les 100 à 150.—Fr., qu’il faut parfois en faire plusieurs (il en existe plusieurs marques et, pour chaque marque, plusieurs tests censés être adaptés aux branches) et qu’il existe des cours de préparation à ces tests, pour 170.—Fr.. Si les entreprises formatrices doivent payer ces tests, nul doute qu’elles s’intéresseront de plus près à leur contenu et se rendront compte qu’ils n’ont aucun rapport avec le métier, qu’ils contiennent des questions absurdes qui ne permettent pas de se faire un idée des compétences du futur apprentis, voire qu’ils prennent carrément les futurs apprentis pour des imbéciles. Nul doute également qu’elles se rabattront, comme le font déjà de nombreuses branches depuis de nombreuses années, sur des tests sérieux, en rapport avec le futur métier et organisé par de vrais spécialistes, les associations professionnelles. Une sélection sérieuse des futurs apprentis est en effet un devoir important des entreprises formatrices: C’est rendre service au jeune postulant que d’éviter qu’il ne se lance dans un métier qui n’est pas pour lui. Une sélection sérieuse est donc indispensable. Mais on ne peut en aucun cas parler d’une telle sélection au sujet des multicheck!
Après plusieurs années de combat contre les multichecks, basic-check et consorts, c’est une belle victoire!

Florilège de mesures contre le chômage des jeunes

En février, lorsque l’Union Syndicale Suisse annonçait 30’000 jeunes chômeurs de moins de 25 ans pour fin 2009, beaucoup avaient crié à l’alarmisme de mauvais aloi. Avec le récent pronostic de l’Union patronale suisse – 43’000 jeunes chômeurs pour 2010 – plus question de remettre en question la nécessité d’agir pour l’emploi des jeunes. Doris Leuthard, conseillère fédérale responsable, a associé les partenaires sociaux à son appel aux entreprises de créer de nouvelles places de stages pour jeunes demandeurs d’emploi. Mais, comme les appels à la bonne volonté ne suffiront probablement pas, d’autres mesures seront nécessaires. Jetons un regard critique sur quelques-unes d’entre elles: Continuer la lecture

Loi sur la formation professionnelle: premier débat (suite)

Cet après-midi, le grand conseil a achevé l’examen en 1er débat de la nouvelle loi cantonale sur la formation professionnelle (nLVFPr) (compte-rendu du début du premier débat).

La semaine passée, la droite avait imposé ses vues et taillé dans le pouvoir d’achat des apprenti-e-s et de leur familles en supprimant la prise en charge de la demi-prime d’assurance-maladie par l’employeur, sans tenir compte des faibles salaires des apprenti-e-s ou de l’explosion des primes annoncées pour cet automne. Aujourd’hui, le grand conseil a limité les dégâts, en acceptant le modèle d’allocation de formation, censé remplacer la demi-prime. C’est mieux que rien, mais le montant mensuel de 80.—Fr. est inférieur aux 90.—Fr. à 100.—Fr. dont bénéficient actuellement en moyenne les apprenti-e-s et leur familles. Le groupe socialiste s’est finalement rallié à cette proposition (d’autant plus qu’il en a obtenu le déplafonnement, voir ci-après), afin que le pouvoir d’achat des jeunes en formation ne soit pas trop diminué.

Non aux effets des seuils!
En revanche, il s’est – avec succès – fermement opposé au plafonnement de cette allocation. La majorité du grand conseil (PS, AGT, presque tous les verts, presque toute l’AdC, quelques radicaux et UDC) a en effet accepté de déplafonner cette allocation pour supprimer l’effet de seuil, contre l’avis de la majorité de la commission. On ne peut que s’en réjouir, car sinon, les apprentis touchant plus de 1200.—Fr. par mois auraient perdu leur demi-prime sans bénéficier de l’allocation censée la remplacer et auraient donc été les grands perdants de cette histoire. Ce plafonnement aurait entraîné d’autres effets pervers, par exemple une entrave à la négociation collective: une hausse de salaire entraînant le dépassement du plafond signifierait en fait…  une baisse des revenus des apprentis concernés. Absurde!

Il ne reste plus qu’à confirmer cette bonne décision lors du 2ème débat (qui aura probablement lieu la semaine prochaine).

Les autres points de la loi n’ont guère fait débat et le PS a pu engranger d’autres succès importants (après celui de la semaine passée contre les multichecks), notamment la refonte du système de surveillance de l’apprentissage, l’amélioration de la validation des acquis, du soutien à la formation continue et la création du fonds cantonal pour la formation professionnelle.

Un fonds vaudois pour encourager les entreprises formatrices!
Il était temps que le canton de Vaud se dote, à l’instar des autres cantons romands, du Tessin et de Zürich, d’un fonds qui répartis les frais de formation professionnelle sur toutes les entreprises, et pas seulement sur celles qui se donne la peine de former des apprenti-e-s. Les entreprises non formatrices (plus de 4 entreprises sur 5) seront désormais incitées à former. Et, si elle décident de persister dans la resquille (profiter du bon niveau de formation des jeunes formés par d’autres), elles passeront à la caisse. Quant aux entreprises formatrices, elles seront concrètement soutenues sans que cela ne coûte un centime au contribuable, le fonds étant uniquement financé par les cotisations patronales, 0,1% de la masse salariale au maximum. Ce mécanisme de redistribution rétablit donc l’équilibre en faveur des entreprises formatrices.
On peut certes regretter que le fonds ne permette pas de financer une palette plus large de projets en faveur de la formation professionnelle, notamment en faveur de l’égalité des genres comme cela est le cas dans le canton du Jura. Le groupe socialiste a cependant renoncé à déposer des amendements sur ce sujet, jouant le jeu du compromis général sur lequel se base cette loi.
Il faut encore relever l’évolution positive des partis bourgeois et des milieux patronaux: S’ils rejetaient unanimement l’initiative socialiste et syndicale «pour des places d’apprentissage» qui préconisait la création d’un tel fonds en 2003, ils se sont désormais ralliés à ce modèle et l’ont soutenu depuis le début. Ils ont renoncé à suivre l’exemple de leurs homologues jurassiens et zurichois, qui ont attaqué le fonds cantonal par référendum et largement perdu dans les urnes (mais il faut noter que le revirement patronal vaudois date d’avant ces votations). Ainsi, on a par exemple entendu le député UDC Bertrand Clot parler de fonds «utile» ou le député radical Olivier Feller vanter «l’équité» de ce modèle. Nos idées font leur chemin!

D’autres informations, notamment sur le second débat, suivront sur ce blog…

Loi sur la formation professionnelle: premier débat

Cet après-midi, le grand conseil est entré en matière sur la nouvelle loi vaudoise sur la formation professionnelle (nLVFPr). L’entrée en matière n’était contestée par aucun bord, car le projet repose sur un large consensus, auquel les partenaires sociaux ont été associés dès le début (le dialogue social se poursuit d’ailleurs pour l’élaboration du règlement d’application).

Le début de la fin des multicheck:
Le PS a pu engranger un premier succès avec l’acceptation en premier débat de sa proposition de mettre les tests de sélection payants (style multicheck) à la charge des employeurs qui les exigent. Cette disposition devrait encourager les entreprises formatrices à renoncer à utiliser ces test peu sérieux et discriminatoires et privilégier des tests organisés par les associations professionnelles et testant réellement l’aptitude des candidat-e-s à l’apprentissage à apprendre le métier en question.

Mauvais tour contre le pouvoir d’achat des apprenti-e-s:

Comme on pouvait le prévoir, les débats se sont surtout concentrés sur la proposition de la majorité bourgeoise de la commission de supprimer la prise en charge de la demi-prime d’assurance-maladie par l’entreprise formatrice. Malheureusement, la droite a imposé ses vues et taillé dans le pouvoir d’achat des apprenti-e-s et de leur familles en confirmant la suppression de la demi-prime, sans tenir compte des faibles salaires des apprenti-e-s ou de l’explosion des primes annoncées pour cet automne. Mais le groupe socialiste ne renoncera pas à défendre les apprenti-e-s et tentera de rappeler la majorité à la raison en deuxième débat.
Les autres points de la loi seront débattu lors de la suite du premier débat qui aura normalement lieu mardi prochain.

Subventionnement de la création de places d’apprentissage: scepticisme

Le conseil d’Etat du canton de Vaud vient d’annoncer, dans le cadre de ses mesures de crise, la création d’une subvention de 5000.—Fr. pour chaque création de nouvelle place d’apprentissage, ainsi qu’une subvention de 500.—Fr. pour chaque place maintenue.
S’il faut saluer le fait que le gouvernement agisse concrètement en faveur de l’emploi des jeunes et la création de places d’apprentissage (dont le marché est dans une situation inquiétante qui pourrait s’aggraver avec la récession), je ne peux m’empêcher d’avouer un certain scepticisme face à ce type de subventionnement, sans toutefois connaître le projet dans les détails.
En effet, une mesure similaire a été introduite en Autriche il y a quelques années («bonus Blum») et n’a pas été un franc succès. Le subventionnement autrichien, même s’il a certes influencé positivement l’offre en place de formation, a été victime d’un effet d’aubaine important (la plupart des places subventionnées auraient été créées de toute façon) et a coûté très cher pour pas grand’chose: Entre 70% et 77% des places d’apprentissage créées en Autriche entre 2005 et 2006 l’auraient été sans la prime «Blum». En outre, le coût réel de chaque nouvelle place créée était énorme: entre 28’000 et 37’000€, alors que la subvention ne s’élève qu’à 8400€ par nouvelle place (source: actualités de la formation professionnelle (pdf)).
A mon avis, la décision de former ou non des apprenti-e-s ne dépend pas de considérations financières à court terme, mais peut être influencée par un soutien à long terme, par exemple grâce à un fonds cantonal comme celui qui est prévu par la nouvelle loi sur la formation professionnelle (nLVFPr). Dont le grand conseil entame l’examen cet après-midi (à moins qu’il ne traîne trop – des nouvelles bientôt sur ce blog!).
Si le gouvernement peut débloquer 5 millions en faveur de l’emploi des jeunes, peut-être ces montants pourraient-ils être mieux utilisés, par exemple pour des mesures soutenant les entreprises formatrices en difficulté afin que leurs apprenti-e-s puissent terminer leur formation, ou des mesures en faveur des jeunes qui ont terminé leur apprentissage et qui ne trouvent pas d’emploi.
En revanche, il faut saluer sans retenue les moyens supplémentaires alloués au projet TEM (transition école-métier, qui devrait être pérennisé lui aussi dans le cadre de la nLVFPr) par le conseil d’Etat. Le système TEM est en effet un moyen efficace de prévenir la rupture de contrats d’apprentissage.