ISDS : une justice parallèle au service des multinationales

Connaissez-vous l’« investor-state dispute settelment » (ISDS), ou résolution des différends entre investisseurs et Etats ? C’est un instrument discret et opaque à la disposition des multinationales et qui pourrait coûter cher aux contribuables helvétiques : On parle de 8 milliards de francs. Pour comprendre, rembobinons.

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Responsabilité judiciaire des réseaux sociaux: succès parlementaire a posteriori

Le Conseil fédéral propose aujourd’hui de mettre en oeuvre ma proposition d’obliger les réseaux sociaux à avoir une représentation juridique en Suisse. Avec Christian Levrat, nous avions déposé deux motions identiques en 2016 (la mienne, la sienne) pour que les réseaux sociaux aient un représentant en Suisse, qui soit en mesure de collaborer avec la Justice. Elles ont été retirées au profit d’une motion de la commission des affaires juridiques du Conseil des Etats.

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Une IA pour traiter les interventions parlementaires : un pas vers l’automatisation de la démocratie (et donc sa fin ?)

Le magazine en ligne inside-IT rapporte que l’administration cantonale zurichoise a fait des tests d’usage d’intelligence artificielle (IA), notamment pour identifier là où il serait nécessaire de poser des garde-fous pour que ces usages soient conformes au bien commun, transparents, contrôlables et équitables. Une plutôt bonne idée, quand on sait que l’usage de l’IA, qui contrairement à ce qu’on croit, n’est en soi pas plus objective, neutre et rationnelle que les humains qui l’ont conçue, même si elle est faite de chiffres, de données et de processus qui ont l’air logiques. Cette idée est toutefois plutôt dangereux pour la démocratie telle que nous la connaissons et l’apprécions.

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Pour les Suisses-ses de l’Etranger : vote électronique ou envoi électronique ?

Un des (rares) arguments récurrents en faveur du vote électronique est le vote des Suisses-ses de l’Etranger. Indépendamment de la question de leur accorder ou non le droit de vote (une question qui mérite d’être discutée comme c’est le cas ici), il est vrai qu’ils ont souvent des problèmes à l’exercer. En effet, en raison des lenteurs des services postaux hors de Suisse, les documents de vote arrivent souvent trop tard. Soit à leur domicile, soit, après avoir été remplis et renvoyés, au bureau de vote en Suisse. Certains considèrent que le vote électronique pourrait être une solution, notamment l’Organisation des Suisses de l’Etranger (OSE), qui exige depuis de nombreuses années la généralisation immédiate du vote électronique, sans faire grand cas des problèmes de sécurité. Il est vrai que, depuis la décision du Conseil fédéral de mettre un terme (hélas temporaire) aux essais de vote électronique suite à d’importants problèmes de sécurité, la participation électorale des Suisses de l’Etranger a chuté. De nombreuses personnes concernées se sont notamment plaintes de n’avoir reçu les documents électoraux qu’après le scrutin. Continuer la lecture

Les algorithmes votent à la place des citoyens : un cauchemar signé avenir.suisse

Récemment, avenir.suisse, qui nous avait plutôt habitué à son mépris pour la démocratie tant directe que parlementaire, a publié un document sur la démocratie directe numérique. J’ai d’ailleurs déjà abordé leurs fadaises à propos du vote électronique. Mais une lecture attentive d’une de leurs propositions passée inaperçue fait autrement plus froid dans le dos que les grandes lignes dont ont parlé les médias. En effet, une de leurs propositions n’est rien de moins que la réalisation d’une des pires dystopies qui soit : le remplacement due la volonté populaire par celles des algorithmes. Continuer la lecture

Les cyberattaques russes contre les élections US montrent (à nouveau) les risques du vote électronique

La NZZ a récemment présenté un rapport de la commission des services secret du Sénat étatsunien sur les tentatives russes d’ingérence dans le processus électoral de 2016. S’il est clair que les enjeux géopolitiques dépassent largement ce qui se passe en Suisse, ce rapport n’en est pas moins fort intéressant dans un contexte où diverses organisations (notamment celle des Suisses de l’étranger) et administrations (certains cantons, dont FR et NE) veulent instaurer coûte que coûte le vote électronique. Il est aussi fort regrettable qu’aucun média romand n’en ait parlé. Il est vrai que ces derniers semblent être plutôt favorables au vote électronique.

Ce rapport est très inquiétant. Il montre en effet que des hackers ont mené tentatives de manipuler les résultats dans tous les états US. Continuer la lecture

Vote électronique Scytl/La Poste: c’est bien pire qu’une « simple » faille

Hier, une faille importante a été révélée dans le logiciel de vote électronique de La Poste. Ce n’est hélas pas un énième problème de sécurité informatique. C’est bien pire. Car, en plus de la faille elle-même (qu’un expert à qualifié de « stupéfiante » et qu’un autre a considéré comme relevant « d’une programmation négligente »), ce sont les circonstances de sa découverte et la réaction tant de La Poste que des autorités qui doivent fortement nous inquiéter.  Continuer la lecture

Scandale du vote électronique Scytl/La Poste : la symptomatique réaction des autorités

Hier, le magazine en ligne « Republik » a révélé les sombres dessous de l’entreprise espagnole (aux capitaux US) Scytl, leader mondiale du vote électronique avec qui La Poste collabore pour l’imposer en Suisse. L’article dénonce, en vrac, fiascos électoraux (Equateur, Australie, Norvège), détournement de fonds publics destinés à la recherche, opacité, triche et magouille. On aurait pu s’attendre que les cantons concernés (dont FR et NE) annoncent qu’ils vont analyser la situation et promettent de prendre les mesures qui s’imposent. Eh bien non. Leur réaction a été à l’image de toutes les réactions de toutes les autorités confrontées à des problèmes, failles de sécurité et autres critiques en matière de vote électronique : minimiser, nier, et (ce n’est pas encore le cas pour Scytl/La Poste, mais qui sait) menacer de poursuites pénales.

Voici leurs réactions (postées par le canton de Fribourg et « likée » par celui de Neuchâtel) : Continuer la lecture

Lancement de l’initiative pour un moratoire sur le vote électronique

Mon intervention lors de la conférence de presse de lancement de l’initiative pour un moratoire sur le vote électronique de ce matin:

Trois dangers majeurs que le vote électronique fait courir à notre démocratie

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Protection des travailleurs et initiative « contre les juges étrangers » : ne confondons pas tout !

Hier, un arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) traitant des mesures autrichiennes anti-sous-enchère salariale a été rendu. La CJUE, et ce n’est pas la première fois (souvenons-nous des arrêts «Viking», «Laval», «Luxembourg» ou «Rüffert»), s’est à nouveau prononcée contre les mesures de protection des salaires, donnant la priorité au libre marché, et donc à la libre exploitation des travailleurs. Les partisans de l’initiative d’autodestruction de l’UDC, dite « d’autodétermination » ou « contre le juges étrangers » n’ont pas tardé à prétendre que cet arrêt apporte de l’eau à leur moulin et que c’est un argument en faveur de l’initiative (p. ex. ici). Ce raisonnement est totalement faux, pour plusieurs raisons.

  1. D’abord, parce que cet arrêt ne concerne pas la Suisse. La Suisse n’est pas membre de l’UE et n’a pas à se soumettre aux décisions de la CJUE. Si l’initiative d’autodestruction était acceptée, cela n’y changerait rien, car faire primer le droit interne sur le droit international n’aurait un impact que sur le droit international qui s’applique à notre pays.
  2. Ensuite, cette prise de position concerne plutôt un hypothétique « accord-cadre » entre la Suisse et l’UE, qui pourrait concerner la protection des travailleurs contre la sous-enchère, en particulier l’interprétation de nos « mesures d’accompagnement ». Or, cet accord-cadre n’existe pas encore. Et il n’existera probablement jamais s’il a pour contenu de soumettre nos mesures anti-sous-enchère à l’interprétation de la CJUE. En tout cas, jamais les syndicats et le PS ne l’accepteront et, sans leur soutien, un accord-cadre n’a aucune chance devant le peuple. Là non, plus l’initiative de l’UDC ne change rien : En effet, pour éviter d’avoir à appliquer un accord international qui lui serait défavorable, la Suisse n’a pas besoin de l’initiative dite « d’autodétermination » ; elle n’a qu’à simplement… pas le ratifier. Pas besoin donc de s’encombrer d’un texte aussi radical que flou.
  3. Enfin, il n’est pas inutile de rappeler que, sur la question des mesures de protection des travailleurs et des salaires, l’UDC et la CJUE sont sur la même longueur d’onde. L’UDC a en effet toujours refusé les mesures contre la sous-enchère, que ce soit sur le principe ou leur amélioration. Elle n’a eu de cesse de les combattre au Parlement comme devant la justice (en l’espèce la commission de la concurrence). Et sa prochaine initiative vise à abolir la libre circulation des personnes… et par la même occasion les mesures d’accompagnement (qui lui sont juridiquement liées). Car ce que veut l’UDC, c’est donner carte blanche aux employeurs pour engager qui ils veulent, comme ils veulent… et surtout au salaire qu’ils veulent. Comme la CJUE, l’UDC a toujours été une fervente partisane de la sous-enchère. Et sa récente initiative n’y change rien. D’ailleurs, quand je l’ai signalé dans des discussions sur Facebook, pas un UDC n’a été en mesure de me répondre sur ce point.

Le 25 novembre, un grand NON à l’initiative d’autodestruction !