Représentation des parties devant les prud’hommes: succès de l’USS

Dans son projet de nouveau code de procédure civile unifié, le Conseil fédéral prévoyait d’interdire aux syndicalistes, mais aussi aux représentant(e)s des associations patronales, de locataires et de propriétaires, d’aller défendre leurs membres devant les tribunaux de prud’hommes, respectivement des baux (sur ce sujet). Cela aurait entraîné de facto la création d’un monopole pour les avocat(e)s, qui aurait été néfaste aux intérêts des salarié(e)s. Qui en effet connaît mieux les arcanes du droit du travail et des conventions collectives que les secrétaires syndicaux ? En outre, les coûts des procédures judiciaires risquaient d’augmenter, car il aurait fallu payer des honoraires d’avocat(e)s, et ces derniers auraient probablement été enclins à les arrondir en poussant les parties à ne pas transiger ou à recourir, même lorsque les chances de succès auraient été faibles. Cela aurait certaine-ment découragé plus d’un(e) salarié(e) de faire valoir ses droits devant la justice.
Suite à l’intervention de l’USS et à un amendement déposé par Carlo Sommaruga (PS/GE), le Conseil national a réintroduit la possibilité pour les cantons d’autoriser les « mandataires professionnellement qualifiés » (p. ex. les secrétaires syndicaux) à représenter les parties d’un procès à titre professionnel. Le Conseil des États s’est ensuite rangé à cet avis.
Le combat se déplace maintenant dans les cantons. C’est désormais là qu’il faudra lutter pour conserver la possibilité pour les syndicats de défendre leurs membres devant les tribunaux de prud’hommes, si elle existe (ce qui n’est pas le cas partout). Parfois, c’est carrément l’existence même de ces tribunaux qu’il faut défendre. En effet, certains cantons, prétendant que le droit fédéral souhaite les interdire (ce qui est faux), tentent de les supprimer, ou l’ont même déjà fait, par exemple St-Gall (malgré un référendum lancé par les syndicats et le PS). Ces tribunaux doivent absolument être maintenus, car ils sont bons marchés, faciles d’accès, rapides et surtout organisés paritairement. C’est ainsi que les droits des salarié(e)s sont le mieux défendus.

Enfin une vraie retraite flexible!

La retraite anticipée est une réalité: un salarié âgé de 60 à 64 sur deux n’est plus actif. Mais elle est aussi un privilège réservé à ceux qui sont déjà privilégiés. Certains la prennent dans de bonnes conditions, par exemple parce qu’ils ont pu s’offrir un plan de prévoyance-vieillesse adéquat. D’autres y sont forcés, souvent parce que le marché du travail ne veut plus d’eux. Les faibles chances des plus de 55 ans de retrouver un emploi sont de notoriété publique. Pour ces salariés, retraite anticipée est synonyme de réduction des revenus et de précarité. Continuer la lecture

Débat télévisé sur le pouvoir d’achat

J’étais vendredi soir l’invité du journal de 19h00 sur TSR 1 pour débattre des propositions de l’USS en faveur du pouvoir d’achat. J’étais aussi l’invité de forums sur RSR la première, sur le même sujet.
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Quelques réflexions à ce sujet:

Il est vrai que la crise financière risque d’avoir des effets négatifs sur l’économie suisse, très tournée vers l’exportation. Cependant, il faut aussi noter que l’économie suisse se porte encore plutôt bien, avec un emploi qui a progressé et des carnets de commande pleins. En outre, la forte augmentation de la productivité du travail de ces dernières années n’a pas été redistribuée aux salarié-e-s, dont les salaires ont stagné, malgré les années de croissance. Ce sont plutôt les actionnaires qui en ont profité, ainsi que les managers, l’écart salarial ayant augmenté. En outre, les entreprises ont amélioré leurs marges, et peuvent donc tout à fait supporter une hausse de salaire de 4 à 5%, comprenant la compensation du renchérissement.

En outre les difficultés des marchés internationaux rendent un renforcement de la demande intérieure, donc du pouvoir d’achat, absolument nécessaire. La Suisse n’a aucune influence sur la crise immobilière aux USA, mais elle peut faire en sorte que sa demande intérieure ne faiblisse pas. Car si elle venait à faiblir, la crise risquerait de devenir très grave.

La migros, aux nues? Aux gémonies!

Ce n’est pas parce qu’on est le premier août qu’il faut renoncer à s’attaquer à un symbole national. Je veux parler de la Migros. Qui a une jolie semaine derrière elle. D’abord, elle est, selon un sondage, en tête du classement des entreprises préférées des Suisses. Ensuite, elle fait un joli coup en nommant à son conseil d’administration Paola Ghillani, ancienne directrice de l’entreprise de commerce équitable Max Havelaar. Qui a droit à deux pages de panégyrique dans «le Matin» d’hier. Dans lequel elle ne manque pas de tresser des lauriers à l’entreprise qui l’emploie désormais, qu’elle considère comme «un société modèle». Forcément, puisque c’est aussi l’avis des sondés. D’ailleurs, Mme Ghillani ne voit aucune contradiction entre son nouveau mandat et son statut d’ex-grande prêtresse du commerce équitable (dont elle fait toujours son fonds de commerce grâce à l’entreprise de conseil en la matière qu’elle dirige). En effet, selon elle, Migros « se comporte de manière respectueuse avec ses fournisseurs et qu’elle a intégré les dimensions environnementales et sociales dans ses processus. En cela elle respecte les principes du commerce équitable et elle fait du commerce équitable.» Ah bon.
Mme Ghillani devrait mieux s’informer, car sur au moins deux points, la Migros foule largement aux pieds les principes du commerce équitable, notamment les droits des salariés. En Suisse et à l’étranger. Continuer la lecture

Pouvoir d’achat: y’en a qui en parlent, y’en a qui en perdent

En France, le gouvernement Sarkozy se fend d’une réclame télévisée pour vanter son combat pour le pouvoir d’achat (voir aussi la réplique du PS français). En Suisse, le pouvoir d’achat des salariées et salariés a reculé en termes réels pour la première fois depuis huit ans: Selon l’OFS, les hausses salariales négociées entre les partenaires sociaux ont atteint +2,2% en moyenne, alors que l’inflation est de 2,5%. Cette régression des salaires réels suit plusieurs années de stagnation, durant lesquelles les entreprises n’ont pas reversé à leurs salariés les gains de productivité réalisés. Cette stagnation était déjà scandaleuse en soi, vus la croissance économique soutenue, l’augmentation de la productivité, le chômage en baisse et les exportations en hausse sur la même période – sans compter les primes d’assurances maladies qui rognent une part toujours plus importante du budget. Confrontés à une telle baisse de revenu, alors que l’augmentation des rémunérations des dirigeants de grandes entreprises continue à ne pas connaître de limites et que les baisses d’impôts ne s’adressent qu’aux (gros) actionnaires, les salariés ont toutes les raisons d’être fâchés.

Ils devraient l’être encore plus en apprenant l’intolérable ingérence que se sont permise un membre du directoire de la Banque Nationale Suisse, M. Jordan, et le chef du Seco, M. Gerber. Ces messieurs se permettent d’appeler les syndicats à de la modération en matière de revendications salariales, par peur d’alimenter la spirale de l’inflation (qui a soit dit en passant pour principal défaut de nuire à la rémunération du capital). M. Jordan menace annonce même des mesures de rétorsion, sous forme de hausse des taux de la BNS, si les négociations de cet automne devaient être trop favorables aux salariés. En somme, ces deux experts (au demeurant grassement rémunérés, rémunération qui ne risque pas de baisser, elle) prescrivent une baisse de salaire à la quasi-totalité de la population, alors que celle-ci n’a pas encore touché sa part des bénéfices des bons résultats économiques.

Manifestation de solidarité avec les grévistes de CFF Cargo, 28 mars, 17h30, gare de Lausanne

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La débâcle de CFF cargo démontre à quelle absurdité mène la logique néo-libérale appliquée au service public. Forcer une entreprise telle que CFF Cargo à être rentable sans subventions publiques est insensé: C’est le meilleur moyen de l’empêcher d’assurer correctement sa mission (le transfert de la route au rail) et de maintenir des emplois dans les régions les moins favorisées, ce qui fait aussi partie des tâches du service public. En échec également, la volonté de retirer toujours plus de compétences aux élu-e-s, pour les confier à des conseils d’administration difficilement contrôlables et qui ne se préoccupent guère de l’intérêt général, mais sont plutôt assujettis à la logique du marché.

La grève et la colère du personnel de CFF Cargo et de la population tessinoise face à une entreprise que l’on démantèle petit à petit, sans consultation du personnel ni des autorités politiques sont donc légitimes. Mais le Tessin, Fribourg et Bâle ne sont pas les seuls concernés. Comme l’ont montré les discussions de ces derniers jours, les CFF sont prêts à faire jouer les sites les uns contre les autres, menaçant les ateliers d’Yverdon-les-Bains. Les vaudoises et vaudois sont donc appelés à témoigner de leur solidarité avec les grèvistes lors d’une manifestation le vendredi 28 mars, à 17h30 devant la gare CFF de Lausanne. Cette manifestation est notamment soutenue par le PSV, la JSV, l’USV, le SEV, Unia et le SSP.

Le site de soutien aux ateliers de Bellinzone.

Le tract unitaire (pdf) de la manifestation.

 

Ne pas bouter les praticiens hors des tribunaux de prud’hommes

Les Chambres fédérales débattent actuellement d’un code de procédure civile unifié au niveau national. Cette unification est nécessaire. Bien qu’ayant un code civil aujourd’hui centenaire, la Suisse est le dernier pays d’Europe qui n’a pas unifié sa procédure civile. Chaque canton connaît et son propre code de procédure et sa propre organisation judiciaire. L’application du droit matériel est ainsi rendue plus difficile et les législateurs cantonaux doivent faire des efforts d’adaptation à chaque fois que le législateur fédéral édicte des règles de procédure civile, ce qui arrive souvent en droit privé social (p. ex. droit de la famille). Ce morcellement n’est plus compatible avec la justice efficace et moderne que la population peut légitimement revendiquer.
Le projet d’unification de la procédure civile contient cependant une lacune qui pourrait porter grandement préjudice aux salariés, aux patrons, aux locataires, aux propriétaires et aux associations qui les défendent.

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RIP: repos dominical

Le Conseil des Etats vient d’accepter l’initiative parlementaire Wasserfallen, qui autorise quatre ouvertures dominicales des commerces sans qu’un besoin urgent soit établi. C’est une nouvelle tranche de la stratégie du salami, dont se servent les milieux économiques pour vider le congé du dimanche de sa substance. Défaits dans les urnes en 1996 alors qu’ils avaient tenté de généraliser le travail dominical, ils sont revenus à la charge par petites tranches, histoire de faire avaler la pilule plus facilement. Et malheureusement, force est de constater que ça fonctionne: Le travail du dimanche est désormais possible sans restriction dans les commerces des grandes gares, l’interdiction de travailler la nuit et le dimanche est tombée pour les apprenties et apprentis de moins de 20 ans et même de moins de 18 ans dans de nombreuses branches. Avec l’initiative Wasserfallen, les cantons pourront autoriser quatre dimanches de travail supplémentaires dans les commerces. Le personnel, qui tient à son dimanche de repos, y est fermement opposé, et cela d’autant plus que, plus on travaille le dimanche, moins on a droit à un supplément salarial. En effet, dès 6 dimanches travaillés par an, les salariés n’ont plus doit au supplément (Art.19 de la loi sur le travail), car ce n’est plus du travail dominical temporaire, mais du travail dominical régulier.
En outre, la majorité UDC-PDC-PRD du conseil des Etats a refusé la proposition de minorité qui voulait que les cantons qui autorisent le travail dominical soumette cette décision au référendum facultatif et à l’obligation de conclure une convention collective de travail pour mieux protéger les employés. Preuve en est qu’une fois de plus, la majorité bourgeoise n’a tenu compte que des intérêts patronaux.
Cette attaque contre le repos dominical, jour de congé commun à toute la population, est grave, car elle en annonce d’autres. Après le personnel de la vente, c’est la totalité des salariés qui risque de bientôt devoir faire une croix sur son repos du dimanche.

Grève et paix

La grève fait la une des médias. En France, mais aussi en Suisse, notamment dans le bâtiment, après les épisodes de la Boillat ou de Crossair. J’ai été invité ce matin sur les ondes de RSR la première pour expliquer le droit suisse de la grève dans l’émission «on en parle» (durée 6’30 »), puis ce soir sur TSR1, pour en débattre du droit de grève et de la paix du travail avec un représentant patronal.

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(cliquer sur l’image pour voir le débat)

Je profite de l’occasion pour publier ici un article que j’avais écrit l’an passé pour «infrarouge» journal de la jeunesse socialiste suisse, sur le thème de la paix du travail.

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