Pour faire avaler à la population une baisse des prestations en matière d’assurance sociale, il n’y a pas plus efficace que la «chasse aux abus». En effet, qui donc accepterait de couper dans des prestations destinées aux chômeurs âgés, aux malades, aux mères, etc., si ce n’est pour éviter que de «méchants abuseurs (si possible étrangers)» n’en profitent «indûment»? Les partisans du démantèlement de la loi sur l’assurance-chômage (LACI) n’allaient tout de même pas laisser passer pareille occasion. Et les voilà qui abreuvent les médias d’annonces sur lesquelles ont voit un type basané (l’«étranger abuseur» tant honni) se la couler douce dans un hamac et n’ayant qu’à tendre la main pour recevoir une liasse de billets de banque. Avec, comme message à peine voilé: Coupons dans l’assurance-chômage (AC) pour éviter que des étrangers sans scrupules ne fassent du «tourisme social» en ne venant en Suisse que pour «profiter des nos institutions sociales» tout en restant bien tranquillement dans leur canapé. Sauf que cette annonce à tout faux: Les barrières pour empêcher «tourisme social» et limiter les abus sont déjà élevées, les chômeurs ne sont pas «payés à ne rien faire», et, surtout, la nouvelle LACI ne changera rien à cet état de fait. Continuer la lecture
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Et revoilà les baisses linéaires
Libéraux et UDC, grands artisans du «bouclier fiscal» vaudois, sont décidément de chauds partisans du «plus on a, plus on reçoit». En témoigne leur proposition de minorité concernant la loi d’impôt 2011 dont le Grand Conseil vaudois débattra en première lecture mardi: Une baisse d’impôt linéaire de 4,5 points. De prime abord, ça a l’air sympa. Une baisse d’impôt, qui peut dire non? Sauf qu’à y regarder de plus près, il s’agit surtout de baisser les impôts des hauts revenus, car le montant de la baisse est d’autant plus important que le revenu imposable est élevé. Continuer la lecture
Réponse du Conseil d’Etat à l’interpellation sur les coupes dans les transports publics
Le Conseil d’Etat a répondu aujourd’hui à mon interpellation sur les effets des mesures d’économies prônées par la Confédération au détriment des petites lignes de transports publics (dont, pour Lavaux-Oron, les lignes de car postal Cully-Chexbres-Puidoux et Montpreveyres-Les Cullayes-Servion). Un commentaire détaillé de cette réponse suivra.
La réponse du Conseil d’Etat peut être téléchargée ici.
Commentaire de la réponse du Conseil d’Etat à mon interpellation sur les faux indépendants
J’avais annoncé un commentaire de la réponse du Conseil d’Etat à mon interpellation demandant si un appel d’offre de l’Etat pouvait entraîner l’engagement de faux indépendants par l’administration cantonale, ce qui aurait été du travail au noir. Cette réponse ayant été débattue cet après-midi au Grand Conseil, voici donc quelques remarques.
Tout d’abord, il faut se réjouir que l’Etat n’ait finalement pas engagé de faux indépendants. En effet, c’est une entreprise occupant plusieurs collaborateurs qui a remporté l’appel d’offres mis en cause. Mais le Conseil d’Etat a bien dû reconnaître dans sa réponse à ma question no 2 que, si une personne travaillant en raison individuelle avait remporté cet appel d’offre, elle aurait «perdu son statut d’entreprise indépendante», vu le temps de travail exigé et l’intégration dans les locaux de l’administration.
La fausse indépendance est considérée à juste titre comme du travail au noir, car le faux indépendant n’a d’indépendant que l’apparence et, surtout, la relation contractuelle (mandat au lieu de contrat de travail) et l’affiliation aux assurances sociales (qu’il doit assumer lui-même au lieu que son employeur ne s’en charge et paie la moitié des cotisations). Engager des faux indépendants permet à une entreprise de reporter le risque d’entreprise sur ces ex-employés, en leur faisant miroiter une indépendance factice, mais en les gardant sous leur contrôle comme s’ils restaient ses employés, tout en les laissant se débrouiller seuls avec les assurances sociales et en les privant des normes protectrices du contrat individuel de travail. Le phénomène de la fausse indépendance doit donc être combattu avec vigueur et il aurait été fâcheux que l’Etat lui-même en engage. Fort heureusement, cela n’a pas été le cas et le Conseil d’Etat a assuré le Grand Conseil que des procédures existent pour éviter que de tels cas ne se produisent (réponse à la question no 6). Espérons que ces mesures sont efficaces et qu’il n’y aura plus d’appels d’offres pouvant mettre ceux qui y répondent dans une telle situation.
Supprimer une incitation à retrouver du travail?
Un des meilleurs moyen de faire des économies dans l’assurance-chômage (AC) et de faire en sorte que les chômeurs retrouvent du travail: ils n’ont plus besoin de ses prestations et y cotisent de nouveau. La révision de la loi sur l’assurance-chômage (LACI) supprime pourtant une incitation intelligente à accepter, lorsqu’on est au chômage, un emploi (ou «gain») intermédiaire (art. 24 LACI), en attendant d’en trouver un travail convenable qui permette de quitter pour de bon la situation de sans-emploi. Cet instrument de l’AC est porté à juste titre aux nues par George Sheldon, professeur à l’université de Bâle et spécialiste du marché du travail, dans un entretien donné au «Temps» du 21 août: «[Une] mesure à favoriser est celle des gains intermédiaires. Dans ce cas, le chômeur accepte un emploi pour un salaire inférieur aux indemnités qu’il perçoit. L’assurance-chômage prend alors en charge une partie de la différence entre le salaire touché grâce au gain intermédiaire et l’indemnité à laquelle le chômeur a droit. En acceptant cette solution, le chômeur acquiert de nouvelles périodes de cotisation. Surtout, il améliore son attractivité sur le marché du travail en étant à nouveau actif».
Or, la révision de la LACI prévoit de diminuer, voire de supprimer l’incitation au gain intermédiaire, car les «indemnités compensatoires» ne feront plus partie du revenu assuré. Ce détail technique poussera de nombreux chômeurs à renoncer à un gain intermédiaire, même si cela aurait réduit la facture de l’AC. Continuer la lecture
Pauvre Doris!
Au détour d’un entretien à «24 heures» et à la «Tribune de Genève» (l’encadré dont il est ici question n’est pas en disponible en ligne), Doris Leuthard donne son appréciation de l’abaissement de la notion de «travail convenable», qui pourrait, si le peuple ne refuse pas la révision de la loi sur l’assurance-chômage (LACI) le 26 septembre, forcer les jeunes de moins de 30 ans à accepter n’importe quel emploi, même s’il ne correspond pas à leur formation ou à leurs compétences. Pour ce faire, elle donne l’exemple de sa situation personnelle: Elle aussi a «dû» changer d’emploi. Juriste, elle est devenue Conseillère fédérale: «J’ai une formation de juriste, et maintenant, je travaille comme conseillère fédérale. Je fais tout à fait autre chose». Cette pauvre Mme Leuthard ne dit toutefois pas si ce nouvel emploi correspond à ses compétences… Donc, à son avis, si elle a pu s’adapter, nul doute que les jeunes chômeurs pourront se contenter sans problèmes d’un autre emploi, quel qu’il soit.
Mais l’exemple choisi par Mme Leuthard montre qu’elle n’a rien compris à l’abaissement de la notion de «travail convenable». Il ne s’agit en effet pas de trouver un autre emploi, qui, à l’instar de celui de conseillère fédérale, est bien payé, prestigieux, dont rêve une bonne partie des parlementaires fédéraux et qui soutient largement la comparaison avec celui de juriste. Non, avec le méchant tour joué aux jeunes, il s’agit d’accepter un emploi moins bien payé, aux conditions plus difficiles et qui ne tient absolument pas compte de l’énorme investissement personnel que représente une formation professionnelle. En outre, réserver cette mesure aux moins de 30 ans uniquement n’est rien d’autre que de la discrimination d’une classe d’âge. Enfin, cela crée de la sous-enchère salariale, les travailleurs moins qualifiés devant désormais craindre d’être purement et simplement remplacés par des jeunes moins chers et plus flexibles (même s’ils sont surqualifiés)… Ils n’auront donc pas d’autre choix que d’accepter eux aussi de baisser leurs prétentions pour éviter de se retrouver perdants face à une concurrence déloyale provoquée par l’Etat.
Lors de cet entretien, Mme Leuthard livre encore une information intéressante démontrant que la révision de la LACI n’améliorera pas les incitations à trouver un nouvel emploi: «On doit tenir compte des possibilités offertes par le marché du travail. C’est ce que demande déjà aujourd’hui la loi sur le chômage ». Bon, alors, si la loi actuelle le demande déjà, pas besoin de la durcir. Et Mme Leuthard de conclure, pleine de bon sens: «Attendre à la maison, ce n’est jamais une bonne solution». Là, elle a tout à fait raison. Mais peut-être oublie-t-elle que la loi actuelle prévoit déjà des sanctions contre les chômeurs qui «attendent à la maison» sans rechercher ou accepter un nouvel emploi!
Le 26 septembre, non à une révision de la loi sur l’assurance-chômage discriminatoire et inutile!
Le taux de chômage est-il surestimé?
La RSR l’annonçait tout à l’heure: les chiffres du chômage seraient surestimés. La faute au Seco, qui se base sur les chiffres de la population active datant du dernier recensement fédéral… d’il y a 10 ans. Ainsi, dans le canton de Vaud, le taux de chômage ne serait pas de 5,3%, comme annoncé par le Seco, mais plutôt de 4,5%, soit presque un point de différence. En effet, la population active ayant nettement augmenté par rapport au dernier recensement fédéral, le nombre de chômeurs inscrits – qui est, lui, censé être précisément connu – rapporté à la population active actuelle donne un taux plus faible que le même nombre rapporté à la population active d’il y a dix ans. CQFD. Ce qui fait dire au chef du service genevois de l’emploi, M. Schmied (dont les propos ont été rapportés sur forums sur la RSR), que la Suisse serait «le seul pays à surestimer son taux de chômage». A l’aube d’une votation cruciale sur l’assurance-chômage, voilà qui ne fait pas très sérieux.
Il ne faut cependant pas perdre de vue que le taux de chômage tel que régulièrement présenté par le Seco n’en reste pas moins largement sous-estimé. Car il ne prend en compte que les «chômeurs inscrits» c’est-à-dire les personnes sans emplois immédiatement disponibles, aptes au placement et, surtout, inscrites auprès d’un Office Régional de Placement (ORP). Les demandeurs d’emplois qui, pour une raison ou une autre, ne sont pas inscrits auprès d’un ORP (selon les classes d’âge jusqu’à 40% d’entre eux!), ceux qui ne sont pas immédiatement disponibles, ceux qui ne sont pas aptes au placement et ceux qui ont épuisé leurs droits au chômage (ce que la révision de la LACI se propose d’accélérer…) n’apparaissent, eux, pas dans les statistiques du Seco. Qui sous-estiment donc largement le nombre de chômeurs, grâce à une petite astuce au niveau de la définition officielle de «chômeur». Donc, quelle que soit la population active considérée, les chiffres officiels du chômage, comme dans la plupart des autres pays, embellissent quelque peu la réalité.
Cette petite histoire d’emberlificotage permet de rappeler que la révision de la loi sur l’assurance-chômage repose elle aussi sur une erreur d’estimation du Seco. Lors de la précédente révision de la LACI, le Seco tablait sur un nombre moyen de chômeurs sur l’ensemble d’un cycle conjoncturel d’environ 100’000. Or, en réalité, ce chiffre est plutôt de 125’000. Malheureusement, cette erreur avait justifié que l’on abaisse les cotisations salariales de 3 à 2%, provoquant un déficit structurel de près d’un milliard par an et une dette de près de sept milliards pour l’assurance-chômage. Ce dont s’est servie la majorité bourgeoise du Parlement pour justifier les coupes déraisonnables dans les prestations de l’assurance-chômage que le peuple aura l’occasion de rejeter le 26 septembre prochain. Bref, le Seco s’est planté dans ses calculs, mais tente de faire payer la note aux salariés.
Des coupes sur le dos des jeunes chômeurs ou comment le rêve de Thomas Daum pourrait devenir réalité
En mai 2006, lors de son entrée en fonction comme patron des patrons, M. Daum avait provoqué un tollé en proposant de diviser par deux les indemnités journalières pour jeunes chômeurs. L’indignation avait alors été grande dans les organisations de jeunesse, mais aussi chez tous ceux qui défendent les intérêts des jeunes générations. 4 ans plus tard, avec la 4ème révision de la LACI, son rêve est malheureusement presque devenu réalité. En tout cas, il a déjà passé comme une lettre à la poste au Parlement. Continuer la lecture
Tutelles/curatelles: Quand le Département de l’intérieur cessera-t-il de temporiser ?
Depuis bientôt une année, la commission parlementaire en charge des tutelles/curatelles a dû suspendre ses travaux dans l’attente de nouvelles propositions du Conseil d’Etat. Mais le Département de M. Leuba n’a pas tenu son engagement de présenter ses nouvelles propositions sur les tutelles et curatelles au Grand Conseil «avant les vacances d’été» (réponse de M. Leuba à ma question orale du 11.05.2010, p. 38 du BCG provisoire (pdf).
Ceci alors que, selon les dires du Conseil d’Etat, le projet serait presque sous toit, et ce depuis plusieurs mois. La volonté du Conseil d’Etat de voir ce dossier progresser peut donc être sérieusement mise en doute. Aussi, les membres roses-rouge-verts de la commission exigent-ils qu’en absence de projet gouvernemental, le Grand Conseil prenne lui-même les choses en mains, afin de s’atteler enfin à la résolution de cet épineux problème. Ils sont convaincus que le Parlement saura répondre aux attentes des citoyens visés par cette charge. Continuer la lecture
Re-re-retournement de veste
Les jeunes PLR avaient défrayé la chronique en demandant le retrait de la révision de la loi sur l’assurance-chômage (LACI). Ce qui peut se comprendre de la part d’un parti de jeunes, même libéral, tant cette révision est défavorable aux jeunes chômeurs et chômeuses, qui verraient leurs indemnités de chômage divisées par trois s’ils ne trouvent pas d’emploi dès la fin de leur formation et par deux s’ils ont moins de 25 ans. Et, tant qu’ils ont moins de 30 ans, ils pourraient être obligés d’accepter n’importe quel emploi, même s’il n’a rien à voir avec leurs qualifications. Cette position était plutôt surprenante quand on sait que leur vice-président était venu quelques mois plus tôt défendre la révision de la LACI sur la plateau d’infrarouge, sur l’air du «les jeunes motivés n’ont aucun problème à trouver du travail».
Or voilà t’y pas que l’assemblée des délégués du PLR a décidé à l’unanimité de recommander le «oui» aux coupes dans l’assurance-chômage. Ce qui laisse songeur sur la façon dont les jeunes PLR ont appliqué leur propre position lors de cette assemblée.
Voici donc un petit quiz de l’été pour connaître la ou les raisons de cette belle unanimité:
a) Il n’y avait pas de représentant des jeunes PLR à l’assemblée des délégués du PLR.
b) La demande de «retrait» ne visait que le retrait des mesures défavorables aux plus de 30 ans.
c) La précédente prise de position des jeunes PLR n’avait pour unique objectif que d’épater la galerie.
d) UBS est intervenue en coulisse.
e) Santésuisse est intervenue en coulisse.
f) Economiesuisse est intervenue en coulisse.
g) _________(compléter) est intervenu(e) en coulisse.
h) UBS, santésuisse, economiesuisse et quelques autres sont intervenus en coulisse.
i) Les délégués des jeunes PLR n’étaient pas dans la salle au moment où l’assemblée parlait des jeunes.
j) Les caméras de la TV n’étaient pas dans la salle au moment où l’assemblée parlait des jeunes.
k) Les délégués des jeunes PLR n’ont pas voulu nuire à la belle unanimité de leur parti (il faut dire que ce pauvre en a bien besoin).
l) Les délégués des jeunes PLR ont voulu imiter l’UDC et ses fréquents re-re-revirements.
m) Autre raison:___________(compléter)
Plusieurs réponses sont possibles. Si vous avez une bonne idée pour g) et m), merci de l’indiquer. La meilleure réponse gagne une bouteille de Lavaux.