S’il n’y avait pas de réels problèmes de sous-enchère salariale, l’initiative de l’UDC «contre l’immigration de masse» ne soulèverait pas un débat aussi nourri. Sur le fond, une proposition aussi peu sérieuse ne mériteraient en effet pas qu’on s’y attarde: les «solutions» qu’elle préconise (suppression de la libre circulation des personnes, retour aux contingents de main d’œuvre) sont simplistes, bureaucratiques, ont montré leur inefficacité par le passé et, surtout, menacent directement des accords économiques vitaux pour notre pays: l’Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP), et, à cause de la «clause guillotine», l’entier des accords bilatéraux avec l’Union Européenne.
Malgré ces défauts rédhibitoires, elle met cependant le doigt sur le fait que la libre circulation des personnes pose certains problèmes en matière de salaire ou de logement, problèmes très aigus dans certaines régions frontalières. Il est indéniable que cette situation exige une réponse étatique vigoureuse et décidée, comme le demandent d’ailleurs PS et syndicats depuis longtemps. Mais as le retour aux contingents n’est certainement une solution appropriée.
Plus de bureaucratie, pas moins d’immigration
Car les contingents sont totalement inefficaces pour réguler l’immigration, qui était au moins aussi forte sous ce régime qu’elle ne l’est aujourd’hui. En outre, les contingents font peser une lourde charge bureaucratique sur les entreprises, les poussant bien souvent à délocaliser pour aller trouver la main d’œuvre qualifiée qu’elles ne trouvent pas en Suisse et qu’il est trop difficile de faire venir. Concrètement, la suppression de la libre circulation des personnes ferait peser un fort risque sur l’emploi.
Mais qui sont les vrais coupables?
Quoi qu’il en soit, les vrais responsables de la pression sur les salaires ou de la saturation du marché du logement ne sont pas les migrants concernés. Par exemple, personne n’accepte de son plein gré, un salaire qui ne correspond pas à la valeur du travail fourni ou un logement au loyer surévalué. Les responsables sont plutôt ceux qui font jouer abusivement la concurrence entre travailleurs, pour arrondir leurs profits sur le dos des uns, en espérant que les autres, apeurés par ces pratiques, se tiennent cois. Ces dégâts ne se limitent d’ailleurs pas aux seuls travailleurs, suisses ou migrants; au nombre des victimes, on trouve aussi les autres entrepreneurs, adeptes, eux, de la concurrence loyale. Troisièmes victimes: la collectivité et les contribuables, qui doivent au final payer pour les lacunes d’assurances sociales ou les arriérés de salaires ou de cotisations.
Nul n’est d’ailleurs besoin de rappeler que les figures le plus célèbres de la sous-enchère salariale ou du travail au noir sont toutes des élus UDC: Jean Fattebert (VD), ancien vice-président du parti national, Hans Fehr (ZH), directeur de sa succursale ASIN ou This Jenny (GL), conseiller aux Etats.
Mesures d’accompagnement: des failles à combler
En plus de cette clique qui méprise assez le droit pour le violer ouvertement, on trouve malheureusement des entrepreneurs peu scrupuleux qui profitent des failles de la législation pour sous-payer leur personnel. En effet, dans les branches sans CCT de force obligatoire avec salaires minimaux, payer des salaires plus bas que la norme est autorisé, pour autant que cette sous-enchère ne soit pas «abusive et répétée». Or, la combinaison de cette notion très restrictive avec celle, peu claire, de «salaire usuel» permet, dans les branches sans salaires minimaux obligatoires, de sous-payer son personnel (suisse ou étranger) sans la moindre sanction. Grâce aux efforts constants des adversaires du partenariat social pour éviter la conclusion de telles CCT ou en empêcher l’extension, ces branches sans filet de sécurité salarial emploient malheureusement la grande majorité des salariés (61%). Les cantons et la Confédération pourraient y remédier en édictant des salaires minimaux légaux (par le biais de contrats-type de travail), mais ils ne font que rarement usage de cette possibilité. Inutile de rappeler que l’UDC est généralement opposée à ce que l’on applique tout simplement la loi.
Et, même dans les branches qui ont une CCT qui permet d’éviter la sous-enchère, il n’y a pas assez de contrôles pour débusquer tous les tricheurs. A nouveau, lorsqu’il s’agit d’engager plus de contrôleurs ou de renforcer l’effet dissuasif des sanctions, l’UDC s’y oppose. Peut-être est-elle contre «l’immigration de masse», mais elle est systématiquement de ceux qui en profitent.
Alors, que faire?
La seule réponse aux problèmes de sous-enchère est le renforcement des mesures d’accompagnement: plus de contrôles, plus de sanctions, et, surtout, un salaire minimum légal dans toutes les branches et dans tout le pays pour boucher les trous des CCT de force obligatoires. Un «oui» à l’initiative de l’UDC entraverait ces objectifs, car elle entraînerait la dénonciation de l’ALCP… et donc la caducité des mesures d’accompagnement, qui lui sont liées (nous y reviendrons).
Pour empêcher que les travailleurs se retrouvent sans défense face à une sous-enchère salariale qui ne diminuerait pas, le «non» s’impose.
Bonjour,
votre titre est assez représentatif de ce que fait l’établissement politique face à l’initiative de l’UDC. Il n’est pas question de supprimer la libre circulation mais de la contrôler. Il me semble que chaque état indépendant à le droit de contrôler l’immigration et de tirer le frein quand celle-ci devient disproportioné par rapport à la taille du pays, ces infrastructures, ces finances et sa sécurity.
Il n’est pas étonnant de voir tous les partis unis contre cette initiative.
La gauche continue à rêver au modèle multicultures avec des frontières dissoutes. Un peu du style nous sommes tous des citoyens du monde. Je pensais la même chose quand j’avais 17 ans. En outre il y a bon nombre d’électeurs de gauche qui gagnent leurs vies directement ou indirectement du flux migratoire.
La droite et les lobbys d’entrepreneur raffolent des ouvriers bon marché et n’ont aucune considération macro-économique. Le profit est la seule mesure.
Comme chacun le sait, cette alliance ne trouveras jamais un accord sur les mesures d’accompagnement d’une immigration massive, ces promesses resterons des promesses. La droite n’en veut pas.
En ce qui concerne les problèmes de sécurité publique et les dépenses sociales c’est la gauche qui bloquent car au mieux elle reste totalement angélique face à ces problèmes, au pire elle en profite directement avec tous les thérapeutes, psychiatres, médiateurs, associations, ouvriers sociaux etc.
La question est pourtant simple: Voulons nous une Suisse avec 10 mio d’habitants et pas loin de 50% d’étrangers? Voulons nous une Suisse ou le Suisse paie de plus en plus pour le social qui profite avant tout aux non-Suisse? Comme rappelle: il y a 50% plus de personnes dépendant d’une aide sociale parmi les étrangers que les Suisse. Et je suis certain que ce ne sont pas nos amis italiens, français, portuguais et espagnole qui en sont responsable.
Je crois qu’il serai temps que les politiciens laissent un peu tomber la politique polticienne et qu’ils s’occupent un peu plus du bien de notre pays. En ça les politiciens sont identiques aux CEO moderne – profits à court terme, la pérénité n’est pas une préoccupation…
Bonne journée
Florian, votre commentaire est malheureusement truffé d’inexactitudes:
– Hélas, l’initiative de l’UDC vise bel et bien à supprimer la libre circulation des personnes, car le système de contingents qu’elle préconise (pourtant inefficace pour réguler l’immigration) n’est pas compatible avec l’ALCP, qui devrait alors être dénoncé, entraînant la perte de tous les accords bilatéraux et des mesures d’accompagnements (donc des mesures qui permettent d’éviter la sous-enchère salariale).
– Non, le « social » ne profite pas avant tout aux « non-suisses ». C’est même l’inverse qui est vrai, étant donné que les étrangers versent plus de cotisations aux assurances sociales qu’ils n’en retirent de prestations. Ces oeuvres sociales, p. ex. l’AVS, aurait d’ailleurs de graves problèmes financiers sans l’immigration de ces dernières années.
– Il est possible qu’une partie de la droite (dont l’UDC) ne veuille pas de mesures d’accompagnement. Nous les avons quand même obtenus. Nous en avons obtenus le renforcement à au moins 3 reprises. Et, avec l’aide du peuple, nous pourrons obtenir le salaire minimum légal.
– Personne ne parle d’une Suisse avec 50% d’étrangers. Ce n’est rien d’autre qu’un fantasme qui ne repose sur aucune réalité.
– Le taux d’aide sociale parmi les étrangers est de 6% environ. On est donc loin des 50% que vous avancez. Encore un chiffre fantaisiste.
Quant à votre assertion comme quoi «bon nombre d’électeurs de gauche qui gagnent leurs vies directement ou indirectement du flux migratoire» je vous prie de bien vouloir la détailler un peu. Mais il s’agit certainement d’une autre de vos fantaisies…
Je vous souhaite aussi une bonne journée.
Bonsoir,
de toute évidence vos arguments n’ont malgré une mobilisation du CF sans précédent et des moyens financiers colossaux pas su convaincre la majorité du peuple.
Comme quoi un peu d’humilité et moins d’arrogance vis-à-vis du peuple aurait pu vous éviter ce genre de défaite.
Bonne soirée,
Florian
Effectivement, nous n’avons pas réussi à convaincre. J’espère sincèrement que la population n’aura pas à payer de pots cassés.
Mais rassurez-vous, Florian, ces « pauvres » initiants n’étaient pas à plaindre: ils avaient au moins autant de moyens financiers que leurs adversaires. Savez-vous par exemple que l’UDC a dépensé pour ses campagnes entre 2007 et 2011 près de deux fois ce qu’ont dépensé tous les autres partis réunis?
Quant à l’arrogance que me vous me prêtez, c’est avec plaisir que je m’inscris aux leçons que vous donnez en la matière. Vu l’habileté avec laquelle vous manipulez fantasmes et chiffres farfelus, vous devez être expert!
Bonjour,
l’initiative ne supprime pas la libre circulation mais veut la limiter. Cela demanderai donc une renégotiation. Dire que tous les accords bilatéraux seront caducs est un fantasme. Qui commence une négociation en se disant que tout est perdu d’avance? A croire votre argumentaire, la Suisse seule a à gagner dans les accords que nous avons avec UEE.
Les étrangers sont en effet surrepresentés dans les domaines AI, chômage et aide sociale. Je vous accorde que dans l’ensemble les travailleurs étrangers contribuent grandement au financement des institutions sociales mais il n’est pas questions de fermer les frontières mais de réguler les flux. L’économie a besoin des travailleurs étrangers et la Suisse en employait bien avant la libre circulation. Quant aux frontaliers qui travaillent moins cher dans certains secteurs économiques que les Suisses et laissent ce dernier au chômage, je ne vois pas l’avantage pour nos institutions sociales.
Aujourd’hui nous sommes 8 mio d’habitants en Suisse dont environ 6 mio sont Suisse. Partant de l’hypothèse que dans 20 ans nous serons 10 mio d’habitants dont toujours 6 mio de Suisse, nous avons atteint déjà un pourcentage de 40%. Selon vous c’est où la limite? 30%? Et quand nous y arrivons vous militerez pour une régulation?
Je n’ai jamais dit que 50% des étrangers dépendent de l’aide sociale. J’ai dit qu’ils en dépendent 50% de plus que les Suisses. Donc s’il y avait 4% des Suisses qui sont au bénéfice de l’aide sociale et 6% des étrangers, c’est 50% de plus.
Quant aux électeurs de gauche, vous savez pertinement que la grande majorité sont dans des domaines vivant des dépenses publiques. Il n’y a peu d’entrepreneur ce qui est peu surprenant mais il n’y a pas non plus beaucoup d’ouvriers car cela fait bien longtemps que la gauche n’en tiens plus compte. Des initiatives comme 1:12 sont au mieux la poudre dans les yeux mais au pire un attentat suicide à l’économie Suisse et donc aux ouvriers. L’essentiel de l’énergie passe dans des interdictions pour les Suisses (tabac, vitesse, alcool) et la défense de crapule (dealers, violeurs, pédophile).
Le pire c’est que le PS ne veut pas admettre qu’il y a une partie croissante de la population qui en a marre de ça. Vous auriez bien plus de succès en défendant les intérêts de la classe ouvrière et la classe moyenne résidantes en Suisse (donc y compris tous les étrangers bien intégrés et qui bien souvent partagent ce ras-le-bol)
Bonne journée
Bonjour,
Je suis arrivé quelque peu par hasard, sur cette page, en cherchant quelques informations et je ne peux m’empêcher de réagir à vos propos.
Vous prétendez que le retour des contingents ne supprimera pas la libre circulation, hors d’un point de vue légal, c’est exactement le cas. L’accord sur la libre circulation et les contingents sont deux notions qui ne peuvent pas cohabiter. C’est d’ailleurs pour cette raison que le système des contingents avait été abandonné au profit de la libre circulation. Et l’ALCP faisant parti d’un tout, dénoncer cet accord (ce qui arrivera automatiquement si le oui passe), aura pour conséquence la perte des bilatérales via l’activation de la clause guillotine.
Vous estimez que les étrangers sont surreprésentés auprès de l’AI, du chômage ou de l’aide sociale? Et pourquoi ne pas vous intéresser aux causes?! Par exemple, dites-moi quelle est la proportion de suisses travaillant dans les domaines physiquement éprouvants du bâtiment? Ou encore combien d’ouvriers agricoles Suisses? Je suis personnellement touché par la question, mon père étant lui-même à l’AI (et oui, je suis étranger). Mon père n’est pas venu en Suisse pour demander la charité mais, comme l’écrasante majorité de ceux qui viennent, pour travailler et gagner de quoi réaliser son rêve. Il aimait tellement la Suisse qu’il avait même décidé d’acheter un appartement ici, ce que son salaire, avec celui de ma mère, pouvait financer sans problème. Néanmoins, un beau jour, il n’a plus pu travailler à cause de son dos qui lui faisait souffrir le martyr: la conséquence de 30 années passées à bosser comme un forcené dans des garages. Durant 4 ans, il a dû se battre avec l’AI pour obtenir les prestations auxquelles il avait droit! Durant 4 ans, il a dû supplier des gens de lui prêter de l’argent pour nourrir ses enfants parce que le salaire de ma mère ne suffisait pas. Son rêve, il a dû également le sacrifier, de même que l’appartement qu’il avait acheté, pour pouvoir tout juste survivre et nous offrir, à mes frères et moi, la chance d’avoir une vie meilleur grâce à des études. Bien d’autres étrangers ont des histoires similaires à vous raconter! Il est normal qu’une plus forte proportion de la population étrangère aie recours à cette assurance, quand on sait qu’une forte proportion de cette population travaille dans des conditions pénibles. Quand au chômage ou l’aide sociale, mes connaissances et mon expérience du domaine ne me permettent pas de me prononcer à ce propos. Néanmoins, il est bon de se rappeler qu’en contrepartie, les étrangers versent à l’AVS bien plus que ce qu’ils coûtent à cette même assurance et aux trois que vous avez cité. Par conséquent, en terme d’assurances sociales, la Suisse (et les suisses, surtout) reste gagnante, dans l’affaire.
Par contre, pour ce qui est de l’aide sociale, n’oubliez pas que, dans l’absolu, les étrangers représentent toujours la minorité à l’aide sociale, puisque 4% de la population suisse représente deux fois plus de personnes que 6% de la population étrangère.
Quand à votre affirmation, au sujet de l’initiative 1:12, je ne suis pas d’accord avec elle non plus et considère qu’il s’agit là de se tirer une balle dans le pied. Néanmoins, il convient d’en dire autant de cette initiative sur l’immigration de masse, surtout quand l’UDC prend bien garde de ne pas considérer les conséquences économiques dans sa propagande, et d’oublier que ce système était inefficace par le passé. Le but avoué de l’UDC depuis des années est la suppression des bilatérales et, avec l’aide d’une population dotée d’une mémoire de poisson rouge, il semblerait que ce parti soit sur le point d’atteindre cet objectif.
Personnellement, je n’ai pas peur de cette initiative. Mon domaine d’activité est de ceux qui nécessitent d’engager de la main d’oeuvre étrangère parce que trop peu de suisses s’y intéressent, aussi, je pense être objectif en disant que les conséquences de cette initiative, en cas de oui, seront catastrophiques pour la Suisse.
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