La nouvelle loi vaudoise sur la formation professionnelle (nLVFPr) passera bientôt devant le plénum du Grand conseil. Voici un petit commentaire critique du projet en prévision des débats, qui devraient commencer mardi (si le parlement tient son horaire…):
Du bon…
Cette loi est globalement un succès pour le parti socialiste, car de nombreuses innovation qui font depuis longtemps partie se son programme ont pu y être introtuides. Elle est le fruit d’un long processus participatif, mené d’une main de maître par la conseillère d’Etat socialiste Anne-Catherine Lyon. Sous sa conduite, les partenaires sociaux ont été associés à toutes les étapes du projet (y compris du règlement d’application), dont la mouture finale est portée par un large consensus. Un consensus malheureusement brisé par la majorité bourgeoise de la commission, qui s’en prend au pouvoir d’achat des apprenti-e-s en supprimant la demi-prime d’assuarance-maladie (sur ce sujet).
Parmi les progrès de la nLVFPr, on peut notamment compter l’amélioration de la surveillance d’apprentissage, qui était très lacunaire, parfois partiale et souvent peu professionnelle (et qui avait été vertement tancée dans un rapport du contrôle cantonal des finances genevois). Le nouveau modèle (surveillance de la qualité de la formation par les associations professionnelles; conseillers aux apprentis pour les questions relationnelles) est à mon avis très bon. Il se base sur le projet associatif TEM (transition école-métier) qui a fait ses preuves sur le terrrain et qui a été soutenu depuis le début par les député-e-s socialistes.
Enfin le fonds vaudois!
Le canton de Vaud est le dernier canton romand sans fonds cantonal pour la formation professionnelle. La nLVFPr met un terme à cette anomalie (fondation pour la formation professionnelle, art. 118ss). Le principe du fonds est simple: toutes les entreprises cotisent au maximum 0,1% de leur masse salariale et l’argent récolté (env. 15 millions par an) va aux entreprises formatrices. Qui bénéficient donc d’une redistribution en leur faveur. Et les entreprises qui ne forment pas sont incitées à former. Ce projet ne vient d’ailleurs pas de nulle part: les partenaires sociaux de l’industrie des machines vaudoise avaient déjà créé un tel fonds pour leurs branches, fonds dont le succès n’est plus à démontrer: entre 2004 et 2006, ce fonds a permis la création d’une trentaine de nouvelles places d’apprentissage et encouragé 10 entreprises à devenir formatrices!
En 2003, le peuple et les cantons rejetaient l’initiative socialiste et syndicale «pour des places d’apprentissage» (dont j’étais chef de campagne pour la Suisse romande), sur opposition du conseil fédéral, des partis bourgeois et des milieux patronaux. Cette initiative proposait un modèle de fonds qui, depuis, a essaimé dans 7 cantons (GE, FR, NE, VS, JU, ZH et TI), deux fois sur plébiscite populaire! L’initiative «pour des places d’apprentissage» a donc été un succès a posteriori.
Du très bon…
Le parti socialiste a obtenu une victoire intéressante en commission contre les tests «multichecks», «basic-check» et apparentés. Nous n’avons certes pas réussi à les faire totalement interdire, mais ils seront (si le plénum confirme cette décision) désormais à la charge de l’entreprise qui les exige. Ce sera un réel soulagement pour les familles des jeunes qui doivent faire ces tests payants. Et bien des patrons se rendront probablement compte du peu de sérieux et de l’inutilité de ces tests, et leur privilégieront une sélection sérieuse et qui a un réel rapport avec le métier. Les associations professionnelles mettent déjà de tels tests sur pied dans de nombreuses branches et il faut souhaiter que ces méthodes supplantent définitivement les «multicheck» et consorts.
Du beaucoup moins bon…
Malheureusement, la médaille a un revers de taille: la suppression de la prise en charge de la demi-prime d’assurance-maladie des apprentis par leur employeur (détails sur le sujet). Cette mesure unilatérale sur le dos des apprentis et de leurs familles met en péril l’équilibre de la loi, pourtant basée sur un large consensus. L’équilibre est d’autant plus mis en péril que les entreprises formatrices bénéficieront d’un sérieux coup de pouce de 15 millions grâce au fonds. Si le plénum du grand conseil confirme cette diminution du pouvoir d’achat des familles et des jeunes en formation, il conviendra malheureusement de réserver le jugement final sur la nLVFPr.
Des informations sur le déroulement des débats seront régulièrement postées sur ce blog.
Les documents et rapports de commission sur le site du Grand conseil.