Les fournisseurs de substances psychotropes des apprentis sorciers d’Avenir.suisse ont encore frappé. Et ils n’y sont pas allé de main morte sur les psilocybes. Cette fois, la machine de propagande d’une poignée de grandes entreprises nous a pondu un « indice de liberté » des cantons. Il suffit de se pencher sur les indicateurs qui constituent cet indice pour 1. rire un bon coup (on en a bien besoin) et 2. leur conseiller de prendre des vacances (ils en ont bien besoin). Voyons-un peu.
Voici quelques-uns des points qu’il faut remplir pour être bien classé à « l’indice de la liberté » :
- Libre choix de l’école. Pour avenir.suisse, la liberté, c’est de mettre ses enfants dans une école coranique ou de verser des subventions publiques aux internats sélects.
- Juges non-professionnels. Depuis quand on est plus libre quand c’est un non-juriste qui tranche les différends juridiques ?
- Pas d’interdiction de races canines, ni d’obligation de détenir une licence pour en posséder un chien dangereux. Vive la liberté de se faire mordre par un molosse ! Et vive la liberté de lâcher son molosse sur son prochain !
- Le moins de conventions collectives de travail étendues possible. Moi qui croyais qu’avenir.suisse défendait la concurrence loyale. Or, moins de CCT étendues, c’est plus de sous-enchère salariale, dont une concurrence qui ne fait pas sur la qualité des prestations. Pas très libéral, tout ça.
- Le moins d’interdiction de fumer dans les lieux publics possible. Visiblement, avenir.suisse apprécie le fédéralisme, sauf lorsque les cantons prennent des mesures plus drastiques que la Confédération pour protéger la santé publique de leurs habitant-e-s.
Au rayon des bêtises, on trouve encore quelques citations qui ne se fondent sur rien du tout. Ni faits, ni littérature scientifique, ni même l’avis des voyants-astrologues de la rubrique des petites annonces :
- « La proportion d’employés du secteur public est un indicateur de la présence de l’Etat dans l’économie. Plus elle est élevée plus l’activité de l’économie privée est limitée et donc plus le score du canton est bas dans l’indice de liberté. » Foutaises. On en reparlera quand un employé d’avenir.suisse sera sur une liste d’attente pour un lit d’hôpital ou téléphonera aux forces de l’ordre et tombera sur le répondeur.
- « Dans une économie de marché il est essentiel que les marchés du travail soient flexibles afin que l’équilibre entre offre et demande soit atteint. » Même l’OCDE a échoué à démontrer la véracité de cette affirmation. Ce n’est pas en la répétant qu’elle deviendra vraie.
- « Un budget public équilibré constitue un prérequis fondamental pour la liberté d’action économique et sociale d’un canton et de ses citoyens : moins les finances publiques sont équilibrées moins il y a de points dans l’indice de liberté d’Avenir Suisse. » On en reparlera quand les entreprises que prétend défendre avenir.suisse auront besoin de financement public. Pour la recherche et l’innovation, par exemple. Ou en cas de pandémie. Ou de crise financière.
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas comme si avenir.suisse était un vrai défenseur de la liberté. Au contraire, plusieurs de ses propositions récentes visent à restreindre nos libertés et notre libre-arbitre, par exemple :
- Limiter les droits populaires : la liberté du peuple de refuser les mauvaises idées ou de faire de nouvelles propositions vaut visiblement moins que la liberté d’avenir.suisse d’imposer ses vues sans qu’on puisse les contester.
- Confier la fixation du niveau des rentes du deuxième pilier à des experts au lieu du parlement et du peuple : c’est la version 2.0 de la proposition précédente, souvent appelée « dépolitisation ». Visiblement, avenir.suisse juge que la population et ses élus n’a pas assez de libre-arbitre pour prendre des décisions lorsque l’intérêt de ses mandants est en jeu.
- Coupler smartvote au vote électronique : Là encore, comment prétendre qu’on défend le libre-arbitre quand on propose de déléguer le droit de vote à des algorithmes ?
Belles fêtes de fin d’années à toutes et tous !
(Ajouté le 16.12.21)
Avenir.suisse se distingue décidément par sa grande cohérence: pas plus tard que le lendemain de la publication des bêtises précédemment évoquées (dans leurs « enseignements du fédéralisme face au covid-19« ), ils réussissent le tour de force de féliciter les cantons qui ont été proactifs et volontaires dans leurs mesures de lutte contra le pandémie. Ceux-là même qui sont des ennemis de la liberté, car leurs normes de santé publique vont plus loin que ce que prescrit la Confédération. Puis, alors que le mardi ils disaient pis que pendre des dépenses publiques (liberticides, elles aussi), le mercredi, ils avancent sans rire que « Le fait que de nombreux cantons n’aient pas pu maintenir les capacités des unités de soins intensifs pendant la crise n’est pas de bon augure pour la suite de la pandémie .» et parlent d’une « diminution dangereuse de la capacité en unités de soins intensifs ». Chapeau les artistes!