Je fais cette semaine l’intéressante expérience d’être le délégué des travailleurs suisses à la réunion régionale Europe-Asie centrale de l’Organisation internationale du travail (OIT) à Lisbonne. Contrairement aux autres organisations internationales, l’OIT fonctionne de manière tripartite. Les syndicats et les associations patronales y ont le droit de vote au même titre que les Etats membres (dont la voix compte double) et les décision ne s’y prennent qu’en impliquant toutes les parties.
Cette réunion, on s’en doute, a été placée sous le signe de la crise économique et de la montée du chômage. Crise économique dont les travailleurs ne sont pas responsables mais, dont ils paieront malheureusement le prix. Le Bureau international du travail (BIT – organe exécutif de l’OIT), estime en effet qu’au niveau mondial, 50 millions de personnes perdront leur emploi d’ici l’an prochain. Des sérieuses mesures de relance sont donc nécessaires.Voici quelques éléments importants du point de vue du groupe des travailleurs.
Pour l’emploi
Un large consensus règne au sein de l’OIT sur le fait que les mesures de relance doivent être axées sur la création d’emplois. Les syndicats ont insisté sur le fait de privilégier les plans de maintien en emploi (p. ex. grâce à des mesures de formation continue) aux plans sociaux, car qui tombe au chômage en période de crise a peu de chance de retrouver un emploi. Il faut en outre éviter que les Etats n’aggravent la conjoncture. Pas exemple, les déficits publics et l’augmentation de la dette dus notamment aux mesures de sauvetage du système financier ne doivent pas justifier des coupes dans les budgets sociaux, ni dans les budgets de l’éducation, ni dans les salaires de la fonction publique. Parallèlement, il s’agira de lutter contre les paradis fiscaux, afin que les Etats cessent de perdre des rentrées fiscales dont ils auront besoin pour financer leurs plans de relance.
Les plans de relance devront non seulement permettre de créer des emplois, mais surtout des emplois de qualité. Il est donc important que les normes internationales du travail soient appliquées, p. ex. la convention 94 de l’OIT sur les marchés publics (malheureusement non ratifiée par la Suisse), afin de garantir que conditions de travail et de salaire ne soient pas sacrifiées sur l’autel de la crise.
Pas de concurrence sur les salaires
Un autre point important est d’éviter un accroissement de la concurrence salariale entre pays sous prétexte de «maintenir la compétitivité», car une telle concurrence mènerait dans les faits à une spirale de la sous-enchère aux effets dévastateurs. Il est donc important que les entreprises dont la productivité du travail augmente adaptent les salaires en conséquence, à plus forte raison si elles font des bénéfices. Les syndicats sont en outre favorables à l’introduction de salaires minimaux dans les pays ou branches qui en sont dépourvus. Le rapport du directeur général du BIT (que l’on peut télécharger ici) rappelle à ce sujet que les salaires minimaux, contrairement à ce que prétendent nombre de leurs adversaires libéraux, n’ont pas d’effet négatif sur l’emploi et le niveau des salaires.
Dialogue social
Les syndicats ont insisté en outre sur l’importance du dialogue social et de la négociation collective. Les Etats doivent s’engager à la favoriser, notamment en appliquant strictement les conventions de l’OIT sur la liberté d’association et de négociation (rappelons à ce sujet que la Suisse a été condamnée par l’OIT pour non-respect de la convention 98 sur la liberté syndicale, qui fait pourtant partie des normes fondamentales du travail). Ils se sont aussi inquiétés des récents arrêts de la cour européenne de justice (notamment Laval, Viking, Rüffert), qui montrent une certaine tendance à privilégier le libre marché par rapport aux conventions collectives de travail et ont insisté pour que l’OIT prenne une position claire à ce sujet. Même si ces arrêts ne concernent que l’Union européenne, tous les Etats doivent se préoccuper de cette nouvelle tendance, qui pourrait réduire à néant des années de dialogue social et de succès syndicaux.
Je mettrai un lien vers la déclaration finale de la réunion dès que celle-ci sera en ligne.
Bonjour,
Pourquoi affirmez-vous qu’il ne faut pas couper dans les salaires de la fonctions publiques? Seraient-ils des intouchables alors que les travailleurs du prive se voient infliger des mesures de crise (chomage partiel, etc).
Dans les salaires des professeurs et enseignants, il y a certainement encore des possibilites de reductions, ces fonctionnaires beneficiant d’avantages en nature dont les autres fonctionnaires ne beneficient pas (vacance de + de 3 mois, nombre d’heures enseignees inferieure a 30h. etc.).
Vous voulez combattre les paradis fiscaux, mais lesquels et pourquoi? Chaque pays est libre de decider de ses taux d’impot, non? Precisez svp.
Vous vous prenez pour le representant des travailleurs suisses. Je suis travailleur suisse et ne me sent nullement represente par vous. Un peu d’humilite svp, ou considerez-vous tout au mieux comme un salarie d’UNIA, ce qui ne vous donne aucune legitimite.
Meilleures salutations
@philippe:
Une personne dont on coupe le salaire consommera moins, entraînant d’autres diminutions de salaires, des pertes d’emplois et cela aggravera la crise. une spirale de baisse des salaires entraînera une déflation dont les effets seraient plus graves et plus long que la récession actuelle. Il n’a jamais été question de monter les salariés du privé contre ceux du public. Au contraire il faut prendre des mesures pour que le plus grand nombre conservent emploi et pouvoir d’achat, quel que soit leur employeur.
Visiblement, vous ne devez pas vraiment savoir grand’chose au sujet des enseignants. Sinon, vous ne débiteriez pas de pareils poncifs éculés.
Je ne comprends pas comment vous pouvez soutenir l’existence des paradis fiscaux. Ces Etats pratiquent la sous-enchère et la concurrence déloyale en attirant les bons contribuables d’autres pays non pas par les prestations qu’ils offrent, mais plutôt parce qu’ils permettent, par leurs bas taux d’impôts, à des gens fortunés de se soustraire à leurs obligations envers la communauté.
Libre à vous de me considérer comme illégitime. Cependant, sachez que l’USS organise la moitié des syndiqués suisses (400’000 personnes) et que c’est le conseil fédéral qui m’a nommé pour cette conférence de l’OIT. Si vous voyez un façon plus légitime de procéder, n’hésitez pas à le dire. Et n’hésitez pas à vous présenter à ma place la prochaine fois. Il n’est pas interdit de déposer sa candidature!
Monsieur Schwaab,
Il est normal que vous défendiez votre « beefsteack » et vos électeurs, mais votre réponse à mon intervention, notamment au sujet des enseignants est pour le moins lapidaire:
« Visiblement, vous ne devez pas vraiment savoir grand’chose au sujet des enseignants. Sinon, vous ne débiteriez pas de pareils poncifs éculés. »
-> aucune argumentation, ce qui démontre que vous faîtes dans l’idéologie pure. Ouvrez les yeux mon cher!
Détrompez-vous, je connais bien le milieu de l’enseignement, pour avoir plusieurs membres de ma famille qui en font partie. Et croyez-moi, ces gens ne sont de loin pas à la rue et profites largement de leur (trop) nombreux jours de congés. Et ne venez pas me raconter que les jours où il n’y a pas de cours, ces chers enseignants suivent une formation continue ou préparent leurs cours, ce n’est pas vrai.
Il y a donc un grand potentiel d’économie dans ce domaine, non?
Concernant les soi-disant paradis fiscaux, vous feriez mieux de critiquer le trop d’Etat, les tarifs fiscaux prohibitifs (lorsqu’on paie jusqu’à 60% de ses revenus en impôts, je comprends que l’on veuille fuire). Encore une fois, ouvrez les yeux M. Schwaab, dans les Etats où le taux d’impôt est très élevé resp. où l’Etat est fort, le niveau de vie des individus est faible (Corée du Nord, Cuba, pays, cantons et communes socialistes ou POP, etc.). Impôts élevés et Etat fort implique une baisse de niveau de vie, ne vous en déplaise! Revoyez donc vos classiques!