Le Conseil fédéral a pris la nécessaire et courageuse décision de proposer l’invalidation partielle de l’initiative de l’UDC dite «de mise en œuvre», car cette dernière n’est pas conforme au droit international impératif. Ce droit, voulu par le peuple et les cantons, fait partie de ce qui garantit l’existence même des démocraties et de l’Etat de droit. C’est l’ultime barrière contre la barbarie. S’y opposer, ou vouloir le restreindre comme le fait l’UDC, c’est nier le fait que la dignité humaine doit être défendue par le droit. Et voilà que l’UDC crie au scandale. Elle prétend que c’est violer d’avance la décision populaire que d’invalider une initiative qui prétend définir dans le droit national ce qu’est le droit international impératif. Cela serait pourtant un non-sens, car, si ce droit pouvait être défini unilatéralement par les Etats eux-mêmes, ce serait la porte ouverte à la loi du plus fort, forcément au détriment d’un petit pays isolé comme la Suisse. En outre, restreindre ce droit impératif, fût-ce par un vote populaire, ce serait porter une atteinte majeure au principe même de la démocratie, car ce sont ces règles qui en garantissent l’existence même.
L’UDC veut empêcher le peuple de s’opposer à elle
Mais surtout, les jérémiades de l’UDC cachent que cette dernière n’hésite pas à restreindre les droits populaires lorsque c’est dans l’intérêt de ses riches mécènes. Voici quelques exemples récents:
- «Dépolitiser le deuxième pilier». Dans la droite ligne des technocrates d’avenir suisse, l’UDC a soutenu une proposition visant à confier la fixation du niveau des rentes du 2ème pilier non plus au Parlement, mais à des experts, ce qui exclurait tout référendum en la matière. Battue à plates coutures, avec le reste de la droite et des milieux économiques, lors de la votation sur le taux de conversion en 2010, l’UDC a trouvé une solution toute simple pour que le peuple cesse d’entraver ses plans: faire en sorte qu’il n’y ait plus de vote populaire.
- Frein à l’endettement pour les assurances sociales: Même mécanisme que précédemment. En matière d’assurances sociales, notamment d’AVS, le peuple s’oppose régulièrement aux tentatives de baisser les rentes ou d’augmenter l’âge de la retraite que soutient l’UDC. En soutenant l’idée d’un «frein à l’endettement», mécanisme automatique de baisse des rentes, l’UDC pourra atteindre son objectif d’affaiblir l’AVS sans décision du Parlement, donc sans référendum. Là encore, elle pourra éviter des votes populaires dont on sait d’avance qu’ils iront contre ses plans.
- Plus de travail dominical sans vote populaire. Presque à chaque fois qu’on lui demande son avis, le peuple refuse toute extension du travail dominical. Et, presque à chaque fois, l’UDC est dans le camp des perdants. Ce n’est donc pas étonnant qu’elle ait soutenu la motion Abate, qui préconise d’étendre le travail dominical par voie d’ordonnance, sans aucun vote populaire possible.
- Enfin, l’UDC rejette l’initiative «1 à12» avec notamment comme argument que «le peuple n’a pas à se mêler de la gestion des entreprises». Selon elle, il vaut donc mieux remettre en question les principes fondateurs de notre démocratie plutôt que mettre des limites à des abus privés qui coûtent chers à la collectivité. Et tant pis si le peuple a déjà à maintes reprises limité la liberté d’entreprise, lorsque l’intérêt public l’exige.
Moralité: pour l’UDC, les seuls «bons» votes populaires sont ceux qui lui donnent raison. Elle s’active donc de plus en plus pour restreindre les droits populaires sur les sujets où le peuple pourrait avoir l’audace de s’opposer à ses desseins.