Insoutenable clémence envers les criminels fiscaux…

Imaginons un instant que les forces de l’ordre arrêtent en flagrant délit un dealer notoire. Mais ce dernier leur rétorque qu’elles ne peuvent pas le fouiller, ni l’arrêter, et que personne ne pourra le condamner, parce qu’il ne transporte que peu de drogue, et qu’il ne l’a d’ailleurs pas très bien cachée. Aucune autorité n’aura donc le pouvoir d’établir la preuve de son crime. Il ajoute que, si les forces de l’ordre intervenaient sur mandat d’une autorité étrangère, elles pourraient l’arrêter sans problème. La police n’a pas d’autre choix que de laisser partir le dealer avec son butin.

Choquant, non ? Et il serait tout aussi choquant que le Parlement vote une disposition constitutionnelle qui autoriserait pareille dérive…

Pourtant, c’est bien ce que la droite du Parlement fédéral s’apprête à faire en matière de délits fiscaux. Pour s’en convaincre, il suffit de remplacer, dans le texte ci-dessus, « dealer » par « tricheur fiscal » et « ne transporte que peu de drogue » par « ne soustrait que peu d’argent au fisc » et vous obtenez exactement que ce que prévoit l’initiative trompeusement intitulée « pour la protection de la sphère privée » et le contre-projet que lui a concocté la majorité de droite du Conseil national. Ces deux propositions ne visent qu’un seul but : interdire aux autorités fiscales des cantons et de la Confédération d’obtenir des preuves d’une soustraction fiscale et donc empêcher la condamnation de criminels. Ces autorités auraient moins de pouvoirs que leurs homologues étrangères, car les accords internationaux en matière de lutte contre l’évasion fiscale obligent désormais les banques suisses à collaborer et à échanger des renseignements.

Heureusement, le peuple aura le dernier mot. La place financière, qui mise désormais sur l’argent déclaré et qui a bien compris que l’évasion fiscale n’apporte que des ennuis, combat d’ailleurs tant l’initiative que le contre-projet. Quant aux contribuables honnêtes, eux qui paient jusqu’au dernier centime des impôts d’autant plus élevés que les tricheurs se permettent de ne pas contribuer au bien commun à la hauteur de leurs moyens, ils apprécieront certainement à sa juste valeur cette clémence envers des criminels.

 

2 réflexions sur « Insoutenable clémence envers les criminels fiscaux… »

  1. Ping : Le bilan des quatre sessions 2016 (chapitre 2) | Jean Christophe Schwaab

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *