Dix idées reçues sur la protection de Lavaux et «Sauver Lavaux»

Plus la campagne avance, moins les partisans de l’initiative de trop «sauver Lavaux 3» ont d’arguments (ce petit débat télévisé est un exemple parmi d’autres…). Mais ils n’en continuent pas moins à colporter toute sorte de clichés sur Lavaux, sur sa protection, sur les effets de leur initiative (dont ils ne connaissent souvent pas le texte) ou sur le contre-projet. Voici un petit aperçu:

1. La volonté du peuple de protéger Lavaux n’est pas respectée

FAUX: La protection de Lavaux est efficace. Le peuple vaudois a voulu protéger Lavaux, et il a bien fait. Sa volonté est respectée. Le canton s’est doté d’une loi sur la protection de Lavaux (LLavaux) que l’UNESCO considère comme l’une des plus restrictive parmi tous les sites qu’il protège. Le programme européen de soutien à la viticulture vitour a primé la protection de Lavaux, la considérant comme une «gestion territoriale exemplaire». La LLavaux a été renforcée en 2012 et le contre-projet la renforcerait encore. Cette protection fonctionne: Ces dernières années, aucun projet immobilier contraire au droit ou défigurant le site n’a passé la rampe des tribunaux. La meilleure preuve? L’affiche des initiants: tout ce qu’on y voit est soit inconstructible, soit strictement protégé!

2. Lavaux doit être protégé comme un parc naturel

FAUX: Selon l’UNESCO, Lavaux est un paysage vivant. L’initiative veut protéger la région comme on protègerait un parc naturel: en interdisant de construire quoi que ce soit et en laissant la nature faire. Or, même si elle n’atteint cet objectif qu’en dehors des zones villas (qui resteront constructibles quoi qu’il arrive), elle repose sur une analyse erronée. Ce qui a créé Lavaux et le fait vivre, c’est le travail des vignerons. Or, l’initiative les empêcherait d’innover, de se développer, bref, de survivre. Sans vignerons, plus personnes n’entretiendrait les murs et les paysages de carte postale se rempliraient de friches, de ronces et de murs éboulés.

3. Lavaux est à la merci de promoteurs immobiliers

VRAI, MAIS L’INITIATIVE N’Y CHANGERA RIEN. Pis, en réduisant la zone à bâtir et en poussant les vignerons à vendres leurs maison à des promoteurs, elle aggraverait la spéculation. Paradoxalement, en cas de oui, la seule chose qu’il resterait possible de construire à Lavaux serait… des villas de luxe en zone villa (pour s’en rendre compte, faire ce petit quizz).

4. A Lavaux, on peut construire n’importe quoi n’importe où

FAUX. Les zones viticole et agricole sont et resteront inconstructibles (le contre-projet le garantit). Aucune commune n’a tenté de les étendre ces dernières années. En outre, lorsqu’il est possible de construire, la LLavaux impose des règles beaucoup plus strictes qu’ailleurs, en particulier dans les bourgs et villages. D’ailleurs, sur l’affiche des initiants, on ne peut voir presque que des zones inconstructibles (vigne, crêtes), protégées (villages), ou où l’initiative n’aurait aucun impact sur d’éventuelles constructions (ex-hôtel du signal à Chexbres: permis de construire accordé). La seule zone visible où il serait possible de construire est le port de Moratel, où l’initiative empêcherait la réalisation d’un chantier naval.

5. L’initiative empêche la construction sur des parcelles plantées en vigne

FAUX! Il ne faut pas confondre «parcelle plantée en vigne» et «zone viticole». La seconde est inconstructible (le contre-projet le garantirait) alors que la première peut concerner n’importe quel type de zones, y compris la zone à bâtir. Or, dans les «zones d’agglomération», là où se trouve la quasi-totalité de la zone à bâtir à Lavaux, il sera toujours possible de construire, même en cas de oui à l’initiative.

6. L’initiative soutient les vignerons

FAUX! Il y a plusieurs exemples de locaux destinés à l’exploitation viticole qui ne pourraient plus être réalisés en cas de oui à l’initiative de trop (p. ex. celui-ci). Dans les villages, on ne pourrait plus construire qu’en souterrain, ce que pratiquement personne ne peut se permettre. Les exceptions «pour les besoins des exploitations viticoles» prévues dans le texte de l’initiative ne portent que sur les «reconstructions». Enfin, dans un reportage de la RTS, une initiante dénonce un projet de nouvelle cave chez un vigneron de Riex. Plus loin, sur Facebook, elle condamne un autre projet de vigneron qui doit étendre ses caves et trouver de quoi se loger, ainsi que son personnel… à place d’un terrain vague actuellement recouvert d’une bâche. C’est bien la preuve que, même lorsqu’il s’agit de viticulture, ils appliquent leur bonne vielle méthode de «faire recours d’abord (si possible jusqu’au TF), réfléchir après».

Cela dit, 98% des vignerons de Lavaux soutiennent le contre-projet et rejettent l’initiative. Quand ont leur demande de citer le nom de 10 vignerons favorables à l’initiative, les initiants, d’habitude si diserts, se tiennent cois.

7. L’initiative n’entrave pas les projets d’utilité publique

ÇA DEPEND. Tout dépend de la zone où doivent se situer lesdits projets. Si c’est dans une «zone d’intérêt public» (p. ex. hôpital de Lavaux), construire n’est possible qu’à condition de respecter les règles valables… hors zone à bâtir. Bref, il faut construire selon les règles qui s’appliquent à des zones où on ne devrait rien construire. Les avocats se réjouissent d’avance des belles querelles juridiques que cela ne manquera pas de provoquer.

S’il s’agit d’un parking souterrain (enterré sous la vigne, donc invisible comme à Rivaz), c’est niet. L’initiative supprimer purement et simplement cette possibilité. Les voitures n’ont qu’à encombrer les rues des villages! A Chardonne, les initiants ont par exemple déjà fait opposition à un projet de parking, même s’il se trouve sur un terrain vague. Or, ce projet a reçu l’aval des services de l’Etat qui le considèrent comme «bien intégré au site». Il est en outre vital pour la fréquentation des commerces locaux (p. ex. les clients de vignerons) et éviter que les portes des caves ne se transforment en portes automatiques de garages…

Quant aux projets situés en «zone d’agglomération» (réaménagement de la gare ou nouvelle caserne des pompiers à Cully), pour autant que le terrain ait été légalisé assez tôt (avocats, préparez vos mémoires de recours!), il est inconstructible pendant 5 ans s’il n’est pas construit ce qui est le cas de la parcelle où doit se construire la nouvelle caserne des pompiers, ce qui a fait dire au porte-parole du comité d’initiative que la commune n’a qu’à le mettre «ailleurs, par exemple dans le village» (et tant pis si dans les villages, comme on va le voir ci-après, on ne peut plus rien construire du tout).

Enfin, dans les villages, comme les nouvelles constructions ne sont possible qu’en souterrain que les exceptions prévues par le texte de l’initiative ne concernent que les reconstructions en lien avec l’activité viticole, il ne sera plus possible d’y installer des projets d’utilité publique, même s’ils s’intègrent au site ou si c’est pour remplacer des verrues. (Petit rappel de ce qu’il serait possible de construire en cas d’acceptation de l’initiative)

Quoi qu’il en soit, les belles promesses des initiants ne tiendront pas longtemps face à l’avalanche de recours (qui proviendront certainement en majorité de particulier), qui retarderont ces projets, pourtant nécessaires à la population de Lavaux, pendant plusieurs années. S’ils ne les condamnent pas définitivement!

8. Le contre-projet encourage la spéculation

ARCHI-FAUX. On se demande quelle mouche a piqué les initiants lorsqu’ils sont parvenus à cette conclusion. Le contre-projet réduit la zone à bâtir de moitié en Lavaux, soutient la viticulture et prévoit que des règles architecturales plus strictes seront possible. Bref, je ne vois pas quels avantages les spéculateurs immobiliers pourraient y trouver d’intéressant. L’acharnement des initiants contre le contre-projet montre surtout qu’ils ne souhaitent pas d’autre solutions que la leur (même si elle est meilleure), en témoigne leur opposition au principe même d’un contre-projet (avant de savoir ce qu’il contenait).

9. Les partisans du contre-projet sont de mèche avec les milieux immobiliers

RISIBLE. Le PS et les verts, qui avaient bataillé ferme contre les tentatives de milieux immobiliers d’affaiblir la LLavaux au grand conseil, soutiennent le contre-projet. En faire des marionnettes des milieux immobiliers est risible, voire carrément insultant. Cela n’empêche pas les initiants de les représenter, sur leur site, dans un dessin où l’on voit un promoteur remplir leurs poches de billets de banque…

10. Les vignerons et les communes de Lavaux souhaitent pouvoir faire n’importe quoi et bétonner toute la région

FAUX. Les communes ont édité un guide architectural (que Patrimoine Suisse vient de primer) pour éviter que les constructions ne dénaturent le site. Elles ont aussi accepté de se soumettre à une commission consultative, qui examine chaque projet, afin d’éviter qu’il ne porte atteinte au paysage. Ces règles s’ajoutent à celles de la LLavaux, beaucoup plus strictes qu’ailleurs, largement acceptées dans la région. Dans ces conditions, difficile de prétendre que les gens de Lavaux et leurs autorités ne pensent qu’à construire n’importe quoi n’importe où…

Les partisans de l’initiative ont quant à eux plutôt tendance à voir du bétonnage même là où il ne pourra jamais y en avoir. Ainsi, ils publient sur leur site un plan des zones Chardonne sur lequel ils ont dessiné plein de maisons, pour bien montrer que des villas pourraient pousser partout. Or, ce plan est faux (ils ont fini par l’admettre). Il omet en effet plusieurs maisons déjà construire depuis longtemps et prétend que l’on pourrait construire… sur des zones en réalité non-constructibles. Bref, soit ils ne se sont pas renseignés sur la région qu’ils souhaitent sauver, soit ils induisent les électeurs en erreur…

 

Bref, le 18 mai: NON à l’initiative de trop, OUI au contre-projet!

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