Lavaux: Il va falloir choisir entre un musée ou une région vivante

Le Tribunal fédéral a donc décidé de valider l’initiative de Franz Weber «sauver Lavaux 3». Au grand conseil, j’avais voté contre la validation. Les vaudois vont donc se prononcer.

Disons-le tout net: autant les deux précédentes initiatives «sauver Lavaux» de M. Weber étaient indispensables pour protéger Lavaux, autant la no 3 serait nuisible. En effet, elle figerait presque totalement la région et empêcherait presque toute nouvelle construction, même si elle ne porte pas atteinte au site, même si elle est d’utilité publique, même si elle se situe hors de la zone viticole. Ainsi, un grand projet de la commune de Bourg-en-Lavaux sur la place de la gare de Cully (services publics, logements, commerces à proximité d’une gare qui jouira bientôt de la cadence au quart d’heure vers Lausanne…) serait condamné en cas de «oui». Il en irait de même d’un autre projet autour de l’hôpital de Lavaux, qui pourrait entre autre contenir des logements protégés.

La région doit donc se défendre pour rester vivante et ne pas se transformer soit en un musée de Ballenberg géant, soit en une espèce de communauté résidentielle fermée (gated community). Et les vaudois doivent contribuer à défendre Lavaux, en rejetant un texte qui, s’il part d’une bonne intention, n’en est pas moins extrémiste et jusqu’au-boutiste.

Excellent contre-projet indirect

Les vaudois pourront rejeter «sauver Lavaux 3» avec d’autant plus de confiance que le Grand Conseil vient de doter la région d’une nouvelle loi de protection (LLavaux) qui maintient une protection stricte du site, mais sans entraver les activités humaines. Cette nouvelle loi instaure aussi un organe de dialogue entre promoteurs, autorités et spécialistes de l’aménagement du territoire: la commission consultative de Lavaux, qui aura pour but de veiller à ce que le site ne soit pas défiguré et conserve son label UNESCO, sans être protégé à l’excès. Cette loi a été saluée de toute part comme étant un excellent compromis.

11 réflexions sur « Lavaux: Il va falloir choisir entre un musée ou une région vivante »

  1. Bonjour Jean-Christophe,

    Sur quelle base peut-on se prononcer contre la validité d’une initiative populaire, alors que le tribunal fédérale la confirme ? Parce qu’elle ne plaît pas ou parce que c’est un des rôles du Grand Conseil de décider quelles initiatives peuvent être soumises et lesquelles ne peuvent pas ?

    Autre question, à propos d’un de tes arguments cette fois (projets de gare et de logements) : Alexis Bally semble dire dans ce texte (http://www.verts-vd.ch/fileadmin/user_upload/Actualite/Textes/Actes_verts/ACTES_VERTS_22_web.pdf) que certains projets conformes peuvent tout à fait voir le jour même si l’initiative passe). Quelle est la vérité ?

    Cordialement,

    Yannick

    • Salut Yannick
      C’est une question d’interprétation juridique. Une minorité du grand conseil et la cour constitutionnelle avaient invalidé l’initiative. Leur arguments étaient aussi juridiques. Mais d’autres juristes ont eu un autre avis (ce qui arrive assez souvent). En outre, ta question prend le problème par le mauvais bout: lorsqu’il a débattu de la validité de l’initiaive, le grand conseil ne conaissait pas et ne pouvait pas connaître la position du TF sur la question, étant donné qu’il n’y avait jamais eu de jurisprudence sur un cas similaire…
      Il est vrai cependant que ce système de confier la première décision sur la validité des initiative à une autorité politique et pas juridique comme le Grand conseil est un peu boiteuse et devrait être revue.

      Pour revenir au fond, l’initiative interdit toute construction si aucun PPA ou plan de quartier n’a été approuvé. C’est le cas des projets culliérans. Si l’initiative passe, ces projets ne pourront probablement pas se faire. L’initiative aurait donc pour conséquence d’empêcher des projets d’utilité publique à côté d’une gare très bien desservie, qui plus est sur un terrain vague artisano-industriel qui ne mérite aucun protection. J’imagine que l’intention de Franz Weber n’est pas de figer les quelques verrues qu’il reste à Lavaux. Malheureusement, c’est bien la conséquence que pourrait avoir l’initiative.

      • Merci pour ta réponse (à ce propos, je ne la vois que maintenant, serait-il possible d’ajouter une case à cocher pour pouvoir se tenir informé des réponses aux commentaires ?), donc c’est un combat de juriste, cette réponse me va… (mais m’effraie quand même).

        Je ne retrouve pas le texte de l’initiative : est-ce qu’il empêche de continuer l’approbation de nouveaux PPA ou PQ ? Même s’ils sont d’intérêt public ?

        • Le texte se trouve ici: http://www.sgkgs.ch/images/content/lavaux%5B1%5D.pdf

          Selon son article 20 al.1, c’est à mon avis assez clair: « Dans les territoires d’agglomérations I et II, les secteurs n’ayant pas encore été colloqués en zone à bâtir, n’ayant pas encore fait l’objet d’un plan partiel d’affectation ou d’un plan de quartier ou dont ces derniers n’ont pas fait l’objet d’un commencement d’exécution ou encore, les secteurs n’étant pas équipés lors de l’adoption du principe constitutionnel de sauvegarde inscrit à l’article 52a de la
          Constitution du 14 avril 2003 sont en principe inconstructibles et soumis aux articles 15 et 16 de la présente loi. » Ce qui n’a pas fait l’objet d’un PPA au moment de l’entrée en vigueur de l’initiative est inconstructible…

  2. Selon le Régional, le projet culliéran de réaménagement de la place de la gare est déjà en route et ne serait donc pas touché….(Le ppa est déjà fait.
    Je pense que l’on se doit d’être très précis et bien informé sans quoi on se discrédite. Des arguments dogmatiques, de part et d’autre, ne feront pas avancer le débat, quelque soit la cause que l’on défend.

    • Cher Roulet, je fais toujours très attention à mes informations, car je partage tout à fait votre avis comme quoi « l’on se doit d’être très précis et bien informé sans quoi on se discrédite ». A l’époque où j’ai écris ce billet, c’est-à-dire il y a presque une année, le projet de PPA de la gare de Cully était certes « en route », mais il personne ne pouvait alors connaître sa date d’aboutissement. En revanche un vote sur l’initiative « sauver Lavaux 3 » était déjà possible dans des délais qui auraient pu être brefs. Cette remarque est presque toujours valable aujourd’hui, car le PPA a certes passé l’écueil du conseil communal (étant membre de cette assemblée, j’étais au courant et n’ai pas eu besoin de le lire dans le « régional »), mais vous n’êtes pas sans savoir que les personnes qui se sont opposées peuvent faire recours, d’abords au tribunal cantonal, puis au tribunal fédéral, ce qui peut prendre encore quelques mois, voire quelques années. Or, tant que le PPA n’est pas définitivement sous toit, son sort reste très incertain en cas de oui à l’initiative. Etre « en route » ne signifie en effet pas être « définitivement adopté ». En outre, sachez qu’un autre PPA d’utilité publique (EMS, hôpital, logements) est en préparation dans le secteur gare-hôpital de Cully. Ce projet est lui aussi « en route », mais son adoption définitive devrait aussi prendre plusieurs mois au minimum. Or, il est lui aussi menacé par l’initiative.
      J’espère que vous ne considérerez pas ces quelques informations comme des arguments « dogmatiques » et me réjouis de lire votre réaction.

  3. Ping : De l’interprétation d’une initiative franzweberienne | Jean Christophe Schwaab

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