Comment expliquer le succès de l’initiative pour une caisse publique et unique?

Moins de neuf mois après son lancement, l’initiative «pour une caisse maladie publique» a déjà recueilli 100’000 signatures. Il ne reste que la «marge de sécurité» d’environ 20’000 signatures à récolter et l’initiative pourra être déposée plus de six mois avant l’échéance du délai de récolte. Le texte lancé par le PS, les syndicats, des organisations d’assurés et de patient a donc rapidement convaincu (de mémoire de récolteur assidu, c’était une des initiatives les plus faciles à faire signer…). Ce n’est pas étonnant, quand on constate à quel point la multiplication des caisses-maladie est la cause de la plupart des disfonctionnements de notre système de santé.

Les caisses gaspillent

80 caisses-maladie, c’est 80 directions, 80 conseils d’administration (souvent composés de parlementaires UDC, PLR et PDC dument stipendiés), 80 sièges sociaux, 80 campagnes publicitaires et des innombrables courtiers et comparateurs aux méthodes douteuses. C’est trop. C’est inutile. Les frais de santé à la charge des assurés sont trop élevés pour que l’on puisse se permettre toutes ces dépenses somptuaires. Même s’il ne s’agit que d’une petite partie des coûts à la charge de l’assurance de base, leur suppression serait une baisse bienvenue pour les assurés qui paient trop de primes.

En outre, en matière d’assurance sociale, le public est bien plus efficace que le privé. Ainsi, la SUVA, malgré son monopole sur certaines professions, a des frais administratifs plus faibles que ses concurrents privés. Voilà pour ceux qui prétendent à tort et à travers que «le privé est plus efficace»…

Les caisses sont opaques

La caisse unique ne permettrait pas uniquement de supprimer des frais administratifs. Elle permettrait aussi de mettre un terme à une tendance scandaleuse: Le fait que les primes augmentent plus vite que les prestations remboursées. Par exemple, certaines caisses ont des frais par assurés 50% inférieurs à la moyenne, mais leurs primes sont inférieures de seulement 30%. C’est malheureusement légal. Sans que l’on puisse savoir où la différence a passé. Probablement dans le reconstitution des réserves, mais, le Conseiller fédéral PLR Didier Burkhalter ayant supprimé le contrôle des réserves par canton, il est impossible de le savoir avec précision.

Les caisses sélectionnent les risques

Nombreuses sont les caisses-maladies qui, au lieu d’assurer tout le monde alors que la loi les y oblige, font en sorte de n’avoir que de «bons risques», c’est-à-dire des gens jeunes et en bonnes santé, qui paient leurs primes sans consommer de prestations. C’est possible par exemple en n’étant accessible que sur internet, ce qui exclut par exemples les personnes, notamment âgées (dont les coûts de santé sont plus élevés), qui ne sont pas familiarisées avec cet outil. Ou alors en pratiquant le tiers-garant, c’est-à-dire en obligeant les assurés à avancer les montants des soins pour ne les rembourser que plus tard, ce qui exclut les malades chroniques ou lourds qui n’ont pas les moyens d’avancer des frais de santé colossaux et qui doivent se rabattre sur des caisses qui font du tiers-payant, mais plus chères…

Les caisses n’ont pas intérêt à la prévention

Et c’est justement parce qu’elles peuvent sélectionner les «bons risques » que les caisses ne sont pas intéressées à la prévention. En effet, pas besoin de faire en sorte que les gens ne tombent pas malade si on peut éviter d’avoir à rembourser les malades chroniques et ne garder que les «bons risques» qui ne consomment presque pas de prestations… Or, la prévention est le meilleur moyen de faire baisser les coûts de la santé. Mais si les caisses n’y ont pas intérêt parce que le système le leur permet. Une seule caisse-maladie qui devrait assurer tout le monde ne pourrait pas se «débarrasser» des «mauvais risques» et aurait donc tout intérêt à ce qu’une politique de prévention efficace fasse baisser le nombre de maladies chroniques.

Les caisses ont intérêt au rationnement des soins

Comme les caisses ne peuvent, en théorie du moins, pas faire de bénéfice avec l’assurance de base, elles ont intérêts à ce que leurs clients contractent des assurances complémentaires, plus chères, pour lesquelles la sélection des risques est autorisée et où elles peuvent faire des bénéfices. Or, pour inciter les gens à conclure des complémentaires, ils faut qu’ils aient l’impression, justifiée ou pas, que l’assurance de base de suffit pas à couvrir leurs besoins de santé. En réduisant le catalogue des prestations, les caisses peuvent encourager leurs assurés à conclure des complémentaires qui assurent les prestations supprimées.

Les caisses empêchent les réformes… ou veillent à ce qu’elles leurs soient favorables

Les caisses-maladie sont en conflit à propos de la tarification avec bon nombre de professions médicales, p. ex. les physiothérapeutes. Ce qui bloque les réformes de la tarification. Elles sont aussi en conflit avec les hôpitaux pour des questions de protection des données et de secret médical. Ce qui freine aussi les réformes. A cela s’ajoute le fait que leur faîtière santésuisse ne cesse de perdre ses membres et n’est plus un partenaire représentatif.

Les seules réformes que soutiennent les caisses sont en revanche celles qui sont favorables non pas aux intérêts des patients, mais à leurs propres intérêts. Dernier exemple: les réseaux des soins intégrés (managed care). Précédemment, il y a avait eu l’article constitutionnel basé sur une initiative de l’UDC visant à rationner les soins et à supprimer le libre choix du médecin. Fort heureusement, le peuple avait mis le holà.

Bref, pour remettre l’assurance-maladie sur les rails, signez l’initiative pour une caisse publique, afin de garantir son aboutissement et son dépôt rapide! Et, pour défendre une assurance-maladie efficace et supportable pour tous, votez socialiste!

11 réflexions sur « Comment expliquer le succès de l’initiative pour une caisse publique et unique? »

  1. Cher Jean-Christophe,

    C’est un des projets pour lequel le PS a mon soutien et ou je pense que la droite soutien trop les groupes de la santé.

    La réplication des coûts sera éliminée, ce quipourrait faire baisser les primes. Mais n’oubliez pas que cela n’effacera qu’une infime part des coûts et n’arrêtera pas du tout la HAUSSE des coûts. Pour cela, il faudra tout de lême revoir le système en entier, soit l’aménagement du territoire en terme de centres hospitaliers, les subventions versées aux établissements privés, l’augmentation des coûts du au viellissement, etc…

    Enfin, puisque l’assurance de base est obligatoire et couvre les mêmes services chez toutes les caisses. Il n y a pas de raison d’entendre le mot concurrence entre les caisses!

    Autre sujet:

    Que pensez-vous de réintroduire l’uniforme dans les écoles publiques?

    Salutations,

    Richard

  2. Personnellement, je n’y suis pas défavorable. A mon avis cela permettrait de mettre un terme à la pression qui pèse sur de nombreux jeunes (et leurs parents) d’avoir toujours les habits à la mode, même s’ils sont hors de prix. Cela permettrait de rétablir une certaine égalité. Au grand conseil, j’avais soutenu un postulat allant dans ce sens, qui avait été rejeté.
    Cela dit, les expériences-pilotes menée à Bâle n’ont semble-t-il pas donné les résultats escomptés.

  3. Cher Monsieur,

    Pour garantir une meilleure représentation des femmes au parlement, seriez-vous prêt à refuser votre élection de vient-ensuite pour permettre à Rebecca Ruiz d’être élue au National vu que Géraldine Savary est une femme ?

    Cur-ade

  4. Cur-ade, votre question est un peu incongrue. Mais la question ne se pose à mon avis pas: En cas de réélection de Géraldine Savary, la délégation socialiste vaudoise aux chambres fédérales comptera en effet une majorité de femmes.

  5. «je peux comprendre que vous ne vouliez pas renoncer à une manne financière pour de seuls principes». Cur-ade, cette accusation est proprement inacceptable. Je tiens à préciser que, si vous persistez à mettre mon intégrité en cause, je me réserve la possibilité de donner les suites judiciaires nécessaires à votre commentaire.

  6. M. Schwaab, pouvez-vous affirmer que

    1) les primes ne vont plus augmenter grâce à la caisse unique
    2) les coûts de la santé vont baisser

    Merci pour votre franchise

  7. Philippe, mon billet répond à vos questions, me semble-t-il. En revanche, il est impossible, quel que soit le modèle de financement de la santé, d’affirmer que les coûts de la santé cesseront de baisser et que les primes n’augmenteront plus jamais.

  8. Je ne trouve que cette phrase peu convaincante « leur suppression serait une baisse bienvenue pour les assurés qui paient trop de primes ». Pouvez-vous la chiffrer? Merci.

  9. Cher philippe, c’est vite vu, les frais administratifs s elevant a 1% et en calculant un 1% de plus pour les frais cachés cela fait 2% qui ne seront pas à payer la première année. Ensuite, aucun changement. A long terme la bonne surprise pourrait venir des réserves des caisses qui devraient diminuer!

    • A vous lire, on aurait presque l’impression qu’il n’y aura aucun frais administratifs dans une caisse publique. Est-ce que je me trompe?

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