En réalité, ceux qui «ne paient pas d’impôts» en paient

Le cahier économique du «matin dimanche» titrait dimanche dernier: «40% des vaudois et des genevois ne paient (presque pas) d’impôt». Et l’hebdomadaire orange de trouver ce chiffre, «qui laisse coi»: «hallucinant».
Le «matin dimanche» n’y va pas de main morte en prétendant carrément que ces contribuables «ne paient pas un franc d’impôt». Or, c’est totalement erroné.

Il aurait fallu dire: ces contribuables ne paient pas d’impôts directs (impôt fédéral direct, impôt cantonal et communal sur le revenu et la fortune). La nuance est de taille. Et la conséquence est que ces personnes paient bel et bien des impôts, car elles paient des impôts indirects. En effet, si elles consomment, elles paient de la TVA. Un impôt qui est loin d’être insignifiant, car il rapporte un tiers des recettes de la Confédération. Il est également fort probable qu’elles paient d’autres impôts sur la consommation, comme l’impôt sur les carburant, l’alcool ou le tabac. Sans oublier que, si elles ont un emploi, elles paient des cotisations salariales.
Ce faisant, elles participent elles-aussi au financement des œuvres sociales, au financement des infrastructures de transports, à la santé publique, etc. Ne pas payer d’impôts directs n’est donc pas synonyme de profiter des prestations publiques sans verser un sou à la collectivité.

Respect de la Constitution
En outre, le fait que certains contribuables ne paient pas d’impôts directs montre que le principe constitutionnel de l’imposition en fonction de la capacité contributive est appliqué, en tout cas en partie. En effet, qui n’a pas assez de revenu et peu ou pas de fortune n’a pas à payer d’impôts directs. Car c’est bien le but d’un impôt direct et progressif: celui qui a peu paie peu, voire rien du tout, celui qui a beaucoup paie beaucoup. Et malheureusement, il faut bien reconnaître que ce principe, s’il fonctionne à peu près pour les contribuables modestes ne fonctionne pas pour certains hauts revenus. Par exemple, les gros actionnaires viennent de bénéficier d’abattements aussi inutiles qu’onéreux. Et les contribuables imposés à forfait ne paient qu’une fraction infime de ce qu’ils devraient payer s’ils étaient soumis au même régime que tout le monde. Enfin, comme le relève le rapport de l’USS sur la répartition des revenus, entre 1998 et 2008, les impôts directs ont été allégés aux dépens des impôts indirects, ce qui a favorisé les hauts revenus. Et pas «ceux qui ne paient pas d’impôt», car ces derniers ont été beaucoup plus touchés par la hausse de l’imposition indirecte que par les baisses d’impôts directs, dont ils n’ont logiquement pas vu la couleur. Conséquence, leur revenu disponible a stagné, voire baissé, alors que celui des classes aisées s’est accru.

13 réflexions sur « En réalité, ceux qui «ne paient pas d’impôts» en paient »

  1. 40% de contribuables qui ne paient pas d’impôts directs, c’est honteux et digne d’un état tiers-mondiste. On en est quand même pas au point où en Suisse presque la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. Et pendant ce temps, c’est toujours la classe moyenne, célibataire si possible, qui se fait racketter avec des taux d’imposition marginal qui frise le 50% pour payer les avantages faits aux sociétés, aux imposés au forfait et autres pique-assiettes qui pullulent.

  2. « Par exemple, les gros actionnaires viennent de bénéficier d’abattements aussi inutiles qu’onéreux. Et les contribuables imposés à forfait ne paient qu’une fraction infime de ce qu’ils devraient payer s’ils étaient soumis au même régime que tout le monde. »

    Mais quelle mauvaise foi crasse… Vous oubliez d dire que 2% des contribuables paient 50% de l’impôt fédéral direct. Ces riches que vous détestez financent les plus démunis….

    « Conséquence, leur revenu disponible a stagné, voire baissé, alors que celui des classes aisées s’est accru.  »

    Du grand Christian Levrat, sans nuance et pure populisme/démagogie…

  3. @ balthazar:

    « pour payer les avantages faits aux sociétés, aux imposés au forfait et autres pique-assiettes qui pullulent.  »

    Vous êtes bien mal renseigné sur l’imposition des sociétés et sur l’imposition aux forfaits. Tous ceux qui souhaitent, comme M. Schwaab, imposer plus les société et les riches, se retrouveront face à des rentrées fiscales moindres. Les baisses fiscales, au contraire, participent à la création de richesse et donc à l’agrandissement de l’assiette fiscale. Mais bon, tout socialiste ne peut resp. ne veut pas comprendre cela.

  4. Salut JC,

    Le principe constitutionnel selon lequel il faut être imposé en fonction de sa capacité contributive est en soit parfaitement raisonnable; si tel était réellement le cas, la logique imposerait de conclure que 33 % des Genevois sont indigents (ou presque), puisque ne paient pas d’impôts sur le revenu. Il suffit de survoler les « règles » d’impositions du Canton de Genève et d’effectuer quelques simulations pour constater qu’on couple marié avec deux enfants mineurs disposant d’un revenu brut de 100’000 CHF peut, sans tomber dans l’illégalité, ne pas payer un centime d’impôt sur le revenu. Un revenu brut de 100’000 CHF pour un ménage à 4, ce n’est pas vraiment ce qu’on entend par indigence.

    On observe d’ailleurs un phénomène similiare avec les subventions pour le primes d’asssurances maladies. Dans le Canton d’Uri, plus de 50 % (!) de la population touche des subsides; on pourrait croire qu’Altdorf est une favela ! Si on regarde la chose un peu plus en détail, on constate qu’à Uri, un ménage à 4 (2 adultes, 2 enfants) touche des subventions jusqu’à concurrence d’un revenu IMPOSABLE de 101’000 CHF. J’avais cru comprendre que les subsides pour les primes d’assurance maladie, c’était pour les gens dans le besoin…

    Ce que décrit par « le Matin » est à mon avis une forme particulièrement anti-sociale du phénomène de victimisation: se faire passer pour un indigent alors qu’on ne l’est pas et profiter des moyens qui devraient soutenir ceux qui sont réellement dans le besoin.

    Amicalement,

  5. @Reto

    on parle de 100’000CHF pour 4. Ce n’est effectivement pas ce qu’on pourrait appeler un pauvre. Pourtant, on ne peut se permettre de prendre les chiffres brut.
    Cela serait très confortable dans le valais, c’est certain. C’est déjà un peu moins bon dans le canton de vaud, en restant toutefois bien acceptable.
    Mais pour Genève? Je ne connais pas la situation. Pourriez vous m’expliquer comment il peut faire pour ne pas payer d’impôts?
    Cela m’intéresserait.

    @Philippe

    C’est la bonne manière de prendre le problème en effet. Si 40% ne paient pas d’impôts, baissons la limite, car visiblement trop de monde en profite.
    Aucune réflexion sur les coûts qui augmentent et pas les salaires, sur les loyers inabordables et la nourritures qui coûte plus chère.
    C’est forcément parce qu’il y a trop de profiteur chez les pauvres et biensûr aucune question à se poser sur les salaires versés par les entreprises qui bénéficient de moins d’impôts par exemple…
    votre égoïsme et votre arrogance me laissent sans voix.

  6. @ lefredo:

    « votre égoïsme et votre arrogance me laissent sans voix. »

    Dommage, j’aurais bien voulu vous « entendre » sur le sujet. Vous préconisez, comme M. Schwaab, de taxer encore plus les entreprises et les particuliers?

  7. @lefredo1978

    Prenons un couple avec deux enfants de moins de 6 ans, habitant en ville de Genève; lui travaille à plein temps comme comptable à Satigny, elle travaille à 25% dans une boutique en ville de Genève; notre couple est locataire et n’a pas de dettes. A eux deux, ils disposent d’un revenu brut de 100’000 CHF

    La liste des déductions est la suivante:

    – Assurance sociales (AVS, AI, APG, AC) + caisse de pension + assurance accident; on peut facilement compte 15 % du revenu brut, donc 15’000 CHF.

    – Les enfants: 10000 CHF par enfant, donc 20’000 CHF.

    – Primes d’assurance maladie: cela dépend bien sûr de la couverture; selon les autorités fiscales genevoise, la prime moyenne d’un adulte est de 436 CHF et de 102 CHF pour un enfant, ce qui fait une déduction totale de 12’912 CHF.

    – Frais professionels: le mari peut faire valoir le déplacement et les repas, la femme une partie des déplacements; disons 7000 CHF par ans pour les deux.

    – Les deux parents travaillant, il faut confier la garde pendant un jour par semaine à une tierce personne; sur la base du tarif des crèches de Genève, cela fait env 3600 CHF par ans; si l’institution est privée, ca coûtera plus cher.

    – Frais médicaux non-remboursés par les caisses maladie (dentiste, lunettes, etc..), disons CHF 2000 par ans; le dentiste n’est jamais donné.

    – Au total 4500 par ans pour la prévoyance type 3a.

    Finalement: 100’000 – 15’000 – 20’000 – 12’912 – 7’000 – 3’600 – 2’000 – 4’500 = 34’988 CHF de revenu imposable.

    Avec un revenu imposable de 34’988 CHF, sur Genève, un couple marié ne paie pas d’ICC (et pas d’IFD).

  8. @Reto

    Je vous remercie pour ces chiffres.
    Ben voyez vous, si à cela vous enlever encore le loyer, j’imagine que compter 2’000CHF par mois est réaliste, il reste à cette famille environ 11’000 CHF sur l’année pour vivre, soit moins de 1’000 CHF par mois.
    Une fois l’électricité enlevé, 120.-, il vous reste 880.- pour vous nourrir, acheter les habits nécessaires, payer les déplacements éventuels en ville, mettre de côté pour un petit extra de temps en temps, payer l’abonnement téléphone et la télé/internet.
    Biensûr, on pourrait se dire qu’il leur faut encore payer des impôts, mais alors il ne reste plus rien du tout.

    Je ne suis donc pas choqué, au vu de ces chiffres, que ce couple ne paie pas d’impôts.
    Vous si?

  9. « Je ne suis donc pas choqué, au vu de ces chiffres, que ce couple ne paie pas d’impôts.
    Vous si? »

    Cela signifie que notre politique sociale est fortement redistributive, puisque ce couple profite de toutes les prestations de l’Etat, sans payer le moindre centime.

  10. @Lefredo1978

    Vous oubliez un détail: la déduction de 20’000 CHF pour les deux enfants ne correspond à aucun frais effectif, contrairement aux assurances maladies, coûts médicaux et crèche, qui sont déduits séparément. La famille ne dispose donc pas de 11’000 CHF par ans pour vivre, mais de 31’000 CHF !

  11. Ping : Politique fiscale de droite: peanuts pour la classe moyenne! | Jean Christophe Schwaab

  12. A Genève 61 % d’entreprises ne payent pas d’impôts, selon un professeur d’Université. Après on a beau jeu de dire qu’il n’y a que quelques contribuables qui payent pour tous. Et Vaud combien d’entreprises ne payent pas d’impôts ?

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