L’UDC veut de la sous-enchère salariale

Au détour d’un entretien donné au «Temps», le stratège de l’UDC M. Blocher met les cartes sur la table: Il déclare ouvertement soutenir la suppression des contrôles salariaux dont l’objectif est de lutter contre la sous-enchère. Il souhaite donc laisser libre cours aux patrons sous-enchérisseurs. Et se moque pas bien mal de la baisse des salaires que cela entraînerait. Il évoque aussi son hostilité à ce qui pourtant garantit un bon niveau salarial dans les branches qui en bénéficient: les convention collectives de travail (CCT).
Questionné sur les effets de l’initiative que son parti compte lancer pour dénoncer les accords bilatéraux, M. Blocher déclare sans ambigüité: «Je suis très libéral. Est-ce libéral qu’une armée de fonctionnaires opère des contrôles sur les salaires, de voir se multiplier les contrats collectifs de travail impératifs pour toutes les professions, avec pour conséquence de faire baisser les rémunérations des bons employés?» Bref, il s’oppose à ce que l’on contrôle les salaires pour déceler les cas de sous-enchère. Et qui dit absence de contrôles, dit abus non sanctionnés. Et qui dit abus non sanctionnés, dit incitation à abuser de plus en plus. Le programme de l’UDC est donc clair: supprimer les contrôles pour laisser libre cours à la sous-enchère, puis à la baisse généralisée des salaires. C’est un peu comme si on supprimait la police en espérant que cela fasse baisser la criminalité. Si le parti de M. Blocher parvenait à ses fins, le risque de sous-enchère serait donc beaucoup plus élevé qu’aujourd’hui.
Mais cela ne veut pas dire que les mesures de lutte contre la sous-enchère sont actuellement suffisantes. Au contraire, la croissance des cas de sous-enchère est réelle et les partisans des bilatérales seront bien inspirés de soutenir les propositions de l’USS pour renforcer le contrôle des salaires, les sanctions contre les employeurs qui trichent et contre les maîtres d’œuvre qui ne veillent pas à ce que leur mandataires et sous-traitants respectent tous les règles en vigueur.
Quant aux commentaires de M. Blocher hostiles aux CCT, ce n’est pas son coup d’essai. Il avait naguère encouragé les entrepreneurs à dénoncer la CCT du secteur principal de la construction, au risque de semer la pagaille dans le bâtiment en faisant tomber l’unique barrière à la sous-enchère salariale dans ce secteur pourtant très menacé. Malheureusement pour lui (et heureusement pour les salariés qui bénéficient d’une CCT), la réalité des faits démontre que son appréciation est erronée: En effet, les salaires des branches qui connaissent la négociation collective et les CCT voient leur salaires augmenter plus vite que les autres branches. M. Blocher peut donc prétendre autant qu’il le veut que «les CCT font baisser les rémunération des employés», la réalité lui donne tort.
Cela dit, M. Blocher n’est pas à une contradiction près quand il avoue, quelques lignes plus loin, au sujet de l’ancien système des contingents: «C’est vrai que c’était un peu plus compliqué et bureaucratique». Il faudrait savoir.

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